Rendez-vous avez Mayumi Tsuruchi

Les rues ne sont pas sûres dans la capitale du Joyau qui illumine le monde contre l'obscurantisme religieux. La faute à ces mêmes religions qui ont répandus en une même mesure le sang du peuple athe et le crime dans ce dernier. Mais le garde de Mélia s'assurerait avec efficacité de la sécurité de sa dame. Il s'agissait du même garde qui avait accompagné Mélia au Palais et qui l'avait accueillie au petit matin dans la cuisine. Tout comme le matin même, il arborait l'estafilade toute récente qui courrait du haut de sa lèvre droite pour passer sous la pommette et venir tailler une encoche dans l'oreille droite de l'homme. Loin de le défigurer cela soulignait simplement l'aspect guerrier de sa vie et il est probable que dans cinq ou dix ans, il ne restera de souvenir de cette cicatrice qu'une fine ligne sombre et une marque sur son oreille.

Les rues d'Athéïle aurait perdu tout souvenir de la guerre bien avant cela. La vie y reprenait rapidement et l'activité économique ne tarderait pas à faire de même, balayant presque sans aucun doute possible les traces d'un conflit qui aurait pût se produire ici un jour. Mais on pouvait encore voir, ici un carreau fiché dans la porte d'une auberge, là la marque d'une épée qui s'est brisé contre un mur de pierre ou encore une tâche de sang ne se résumant plus qu'à une tâche sombre au coin d'une ruelle. Une guerre avait-elle jamais eût lieu ? En tout les cas les habitants semblaient ne pas vouloir s'en souvenir car chacune des conversation dont Mélia pourrait capter la moindre bribe dans les rues, éviterait tout rapport au dernières semaines et à leurs conséquences. On ne parlait que de l'avenir qui serait surement rayonnant et des rumeurs qui courraient autour de la traque des derniers fanatiques qui arpenteraient encore la cité par les services de renseignements du Joyau. Mais il n'y aurait nulles péripéties durant le trajet sinon des vendeurs à la sauvette qui avait voulût aborder Mélia, promptement renvoyé par le garde et la vue de son épée affutée.

Arrivée face aux portes du Palais Présidentiel, le garde annonçât sa Dame. Un serviteur les attendaient déjà et guida les deux visiteurs au travers des jardins encore fortement marqués par la récente bataille pour se rendre jusque dans la partie arrière, elle préservé. A cet endroit, le printemps semblait déjà arrivé, le soleil chauffait presque mais une agréable brise marine maintenait la douceur ambiante. Au milieu de ce jardin présidentiel, une petite table abritée par une ombrelle mouchetée accueillait un plateau de confiseries et de boissons tandis qu'une silhouette portant un chapeau haut-le-forme se tenait, assise sur une chaise, son visage dissimulé par un grand journal que cette personne semblait lire. Le journal titrait : "Après la victoire d'Athéïle, reprennent les batailles économiques". Mélia fût invitée à s'assoir tandis que son garde attendait, debout à côté d'elle. La silhouette restait silencieuse et semblait pour l'instant peu décidée à rompre le silence.

Si Mélia a pris un garde qui aurait pu s'adonner à des travaux manuels plus manuel digne d'un artisan, c'est qu'il y a une raison. Les rues ne sont pas sûr, elle s'en doutait déjà avant même d'y mettre les pieds et l'Alchimiste n'est pas "armé" à sa manière. Dans les rues d'une ville, un ou deux gardes suffit, ce n'est pas comme si elle devait tomber dans une embuscade à chaque coin de rues.. Si Mélia n'est qu'une gamine de riches parmi tant d'autres qui a profité de l'héritage dû à la guerre civil, Maïa quand à elle à connu l'âge de l'Obscurantisme et des famines. Elle n'est que trop bien placé pour connaitre les évènements d'un après-guerre. Elle est aussi très bien placé pour savoir que le malheurs des uns fait le bonheur des autres. Et non, cette règle n'est pas sorti tout droit des rues d'Athé! Ce garde aura même un effet que l'Alchimiste n'aura pas pensé, démoralisé tout vendeur à la sauvette. Car si le garde est armé lui d'une épée bien affuté, la jeune fille est armé d'un regard synonyme d'un "qu'est ce que j'en ai à battre de poisson?" et autres variantes de ce genre. Au moins, ces yeux hautains collent pile poil avec son physique de petites princesses pourries gâtées. En espérant qu'elle garde son petit confort, cette guerre religieuse n'était pas prévu aussi bien dans ses plans que pour la fortune de son père. L'Alchimiste, ce qui l'intéressait, c'est la fortune et l'influence des Valern et éventuellement celle d'Anatolus. Si son mariage était imprévu, enfin de compte il l'arrangeait. Un mari, cela n'aurait pas été la première fois, ça rend même le quotidien moins monotone. Et puis si ce dernier la saoule trop , ce n'est pas l'imagination de l'Alchimiste qui manque. Car un mari c'est comme l'alcool, de temps en temps c'est marrant mais quand c'est trop envahissant, on finit par en être dégouter.

Une fois au palais présidentiel, Mélia se rendra vite compte que son rendez-vous risque d'être tout sauf professionnel. Adieu les bureaux trop précieux et bienvenue les jardins verdoyants. Enfin verdoyants il faudra encore attendre quelques mois car si la chaleur est présente, l'herbe peine à pousser. Les traces de combats n'aide rien. Une chose est sûr: c'est toujours mieux que son jardin au manoir, qui lui est complétement saccagé. C'est sous la ombrelle que l'on attendait Mélia qui se dirigea d'un pas sûr là, attiré soit par les confiseries, soit par les futurs exonérations de taxes. Surement les deux en fait... Elle reconnut Mayumi caché derrière son journal, ne serait ce que grâce à son chapeau haut de forme. Après tout, n'est-elle pas réputé aussi pour cela? Dans le milieu bourgeois, ses chapeaux sont un véritable sujet de conversation parmi les dames, voir une véritable légende à faire pâlir le milieu de la mode! Mais il faut avouer que ce genre de conversation soporifique n'intéresse guère Mélia qui n'a qu'une hâte: partir ne serait que pour bailler un bon coup.

- Madame la Présidente.

Brève révérence comme il se doit avant de s'assoir. Au moins cette petite vie de bourgeoise lui aura au moins appris les bonnes manière.

- Vous pouvez disposer Antonin.

Après tout le reste de la conversation allait surtout être une discussion entre deux femmes. Affaire ou sujet banal? Après la scène où Mélia a vu le côté fiévreuse de Mayumi pendant la négociation, cette dernière serait tout à fait capable de lui parler du beau temps en lui remettant des documents qui lui attireraient surement les foudres de certains Seigneurs Marchands.

- Je ne m'attendais pas à avoir un rendez-vous aussi vite et je vous en remercie. J'espère que ce tête à tête ne vous fera pas perdre trop de temps.

Vieille excuse qui ne vaut guère plus que deux piécettes de cuivre! Visiblement, Mayumi a tout le temps devant elle. Les sucreries et les boissons sur la table le sous-entende. A croire que ce rendez-vous est synonyme d'une discussion entre amis. Mélia l'a vu de ses propres yeux, Mayumi est aussi intelligente que tête brulé et cela ne la dérange pas de prendre le taureau par les deux cornes. Elle l'a fait lors de la négociation avec les pirates: Rien n'est laisser au hasard. L'un des avantages de Maïa, c'est de ne pas se fier aux apparences. C'est aussi un inconvénient de voir plus loin que le bout de son nez mais elle ne croit guère aux coïncidences. Mélia n'est qu'une "mioche" comparé à Mayumi, c'est un fait et une simple entrevue dans son bureau aurait largement suffit. Après, c'est tout à fait possible que Maïa fasse dans l'excès de paranoïa...

Le chapeau haut-le-forme était un couvre chef qui trouvait ses premiers modèles à l'aube de l'existence de la République Athée. Il était d'abords porté par les chefs des différentes factions issues des réfugiés venus de tout les endroits du monde dans cette terre déserte de vie humaine. En effet, les chapeaux, par la suite décorés et colorés, servaient ainsi d'étendard représentatif et de distinction d'honneur pour leur porteur. Par la suite, ils ne furent plus que des objets traditionnellement utilisés durant les festivités de l'indépendance athée, comme déguisement ou symbole historique. Mais il y à environs une vingtaine d'année, la mode était revenue pour les hommes les plus riches d'arborer ce chapeau comme un symbole de leur élévation sociale. Cependant, c'était loin d'être un usage féminin, très peu de femme en aurait de toute manière eût l'utilité à l'époque. Toutefois, lorsque Mayumi se fit connaître du grand publique et intégra le cercle très fermé des Seigneurs Marchands, elle apparaissait toujours avec le même chapeau haut-le-forme d'un noir sombre qui, malgré ses nombreux voyages, était toujours intact. On prêta même à ce dernier des propriétés de magique avant de penser, plus logiquement, que Mayumi avait les moyens d'en faire concevoir à l'identique autant qu'elle pouvait le souhaiter.

Mais lorsque Mélia s'adressa à la silhouette derrière le journal, cette dernière se mit à trembler de manière visible et audible grâce au journal entre ses mains. Une personne passât alors d'un pas rapide près de Mélia, cette dernière sentant quelques doigts caresser sa main au passage, et le chapeau sauta de la tête de la silhouette pour atterrir sur les cheveux coiffés en chignon de Mayumi qui se tenait au côté de la chaise. La présidente portait une tenue que l'on aurait difficilement pût qualifier de correcte pour une rencontre officielle et même pour papoter avec une amie dans les jardins du palais. Elle portait un pantalon de cavalière ainsi que de hautes bottes de cuir qu'accompagnait très bien une veste de cavalier en coton sombre. En dessous de cette dernière, une chemise blanche qui laissait presque voir la peau de Mayumi. La présidente prit d'une main le journal, révélant derrière celui-ci la jeune femme en plutôt richement vêtue qui se tenait derrière.

- Merci...

- Cathèrina... murmura la jeune femme.

- Katarina, c'est exact ! Répondit Mayumi avec un large sourire.

Sur ces paroles, la jeune femme, dont les joues rougissaient ostensiblement, s'en alla à travers les jardins en direction du palais présidentiel sans demander son reste. Mayumi s'assit à sa place avant de retirer ses gants d'un blanc immaculé et de se saisir d'un petit gâteau coloré dont elle croqua une bouchée, l'air ravie du goût de la pâtisserie. Puis, tournant le regard vers Mélia déclara :

- Très serviable cette Katarina, j'avais besoin de quelqu'un pour porter mon chapeau et mon journal pendant ma séance d'équitation. Elle m'avait affirmé qu'elle et sa famille serait prêt à soutenir le Joyau de toute les façons possibles dans ces instants difficiles. N'est-ce pas beau de compter parmi nous de tels patriotes ?

Le sourire était joyeux, presque malicieux. La présidente termine son gâteau d'une bouchée avant d'aventurer ses longs doigts agiles parmi les plateaux de douceurs , choisissant avec toute l'attention d'un enfant, la prochaine pâtisserie qu'elle mangerait. Manifestement, elle n'allait pas se préoccuper de pourquoi Mélia était là.

Malgré la situation on ne peut plus reposante, Mélia repéra le coup foireux à des kilomètres. A quoi elle jouait exactement? Elle cherchait un petit chien-chien pour faire tous ses caprices? Elle a déjà cette Cathèrina, ou Katharina mais peu importe, il ne manquerait plus que Mayumi croit faire de même avec l'Alchimiste. Si la Présidente croit avoir une gosse face à elle, ce qui est le cas, Maïa a en revanche passé depuis bien longtemps l'âge à jouer à la poupée après avoir tester mélanges de potions et trouver ça rigolo pour en faire un hobby. Mélia n'est pas dupe, cette dernière connait surement la situation financière des Valern et la jeune alchimiste doute sérieusement que cette petite mise en scène ne soit qu'une coïncidence.

*A quoi tu veux jouer exactement? J'ai peu être le corps d'une gosse mais tu vas tout droit sur un terrain très glissant là.*

Si elle resta poli et que le ton ne changeait pas, le plissement de yeux en dit bien long sur ce qu'elle en pensait. Que la famille de cette Cathèrina décide de la mettre aux services de Mayumi dans l'espoir qu'elle sauve sa famille de la faillite, ce n'est vraiment pas son problème. Ça veut aussi dire qu'elle n'a rien d'autres à proposer en guise de garantie.

- C'est sûr que beaucoup de monde n'a pas vu la guerre civil arrivé. J'imagine que sa famille n'avait pas grand chose à proposer d'autres pour la mettre à votre service et qu'ils n'ont pas su saisir la moindre opportunité de ce chaos. De bons compatriotes en quelques sortes. Mais comme on dit si bien: le malheur des uns fait le bonheur des autres. Cette règle ne vient pas d'Athée mais ça ne m'a pas empêcher de l'entendre plusieurs fois en ville.

Belle façon pour en venir à la raison de sa venue. Elle a saisi l'opportunité pendant la guerre, il reste à savoir si la Présidente respecte la part de son marché.

- En parlant de cela. J'imagine que notre accord tient toujours sinon j'imagine que je ne serais pas là. Cela concernait les exclusivités en textile et autres paperasses de ce genre.

Paperasses de ce genre qui vaut son pesant d'or. Mélia pourrait rappeler le contenue mot par mot de cette arrangement. Le problème, cet arrangement il n'y a aucun témoin. Il reste à savoir si elle ne va pas jouer sur la mauvaise foi ou sur les trous de mémoire pour obtenir ce qu'elle désire.

Le regard brillant d'une gourmandise infantile, Mayumi ne semblait pas prêter attention à Mélia. Elle attrapa de deux de ses doigts fins, une pâte de fruit confit rendue brillante par le sucre. La leva à hauteur de son regard et en prit un minuscule morceau du bout des dents. Puis l'air, ravie du goût, elle prit une véritable bouchée avant de se saisir de l'une des trois théières qui se trouvaient là et de se servir dans une somptueuse tasse en céramique et en or, ce qui ressemblait à du lait de brebis chaud par la couleur, l'odeur et la vapeur qui s'en élevait. Cette seule tasse aurait très probablement suffit à rembourser entièrement l'un des créanciers de Mélia. Puis la présidente de la république, prêtant à nouveau attention à Mélia déclara :

- Mmmh, laissez moi me remettre en mémoire les termes de notre contrat. Mayumi leva sa main droite où se trouvait encore quelques cristaux de sucre, faisant mine de compter sur ses doigts. Garanties sur la société de votre père, qui n'existe malheureusement plus. Petite aide financière sous forme de réductions de taxes, exclusivités sur les marchés du textile avec Hù-Béï et Déméria.

Trois conditions, deux si l'on ne comptait plus ces garanties impossible à appliquer. Mais comme par un curieux hasard c'était le nombre de plateau de gourmandises et de théières sur la petite table. Un bien heureux hasard assurément qui ne manquerait pas d'effleurer l'esprit de l'alchimiste avant que Mayumi ne reprenne.

- Votre comptable vous apprendra surement très prochainement que vos taxes sont étonnamment légères. Il prendra probablement cela pour une erreur de notre part en premier lieu et j'ai hâte de voir comment vous gérerez les prochaines taxes à venir pour lui expliquer cette baisse de taxe.

La présidente se saisit d'une tasse vide, tout aussi richement décorée que celle dans laquelle elle s'était servie et y versa jusqu'à mi-hauteur, un thé aux arômes riches à la fois épicés et mentholés avant de positionner la tasse au centre de la table.

- Pour les exclusivités commerciales, je ne peux vous les donner sur un plateau. Je ne les possède pas et faute de contrat écrit, rien ne me contraint à aller vous les chercher. La présidente posa ses coudes sur la petite table, croisa ses mains et appuya son petit menton dessus tout en accordant un sourire charmeur à Mélia. Ceci étant dit, la situation à Athéïle est particulière et vous avez un très joli minois alors je vais vous aider à obtenir ses quelques exclusivités. Il y à un navire qui partira en direction de Hù-Béï dans huit heures. Soit la prochaine marée, arrivée là-bas, trouvez la boutique de Marie Quatre-Pieds. Pendant ce temps, le Joyau couvrira les frais de gestion de votre demeure et les besoins de vos salariés ainsi qu'une bourse de financement pour les frais de voyage afin rétablir une voie de commerce.

Une nouvelle pause juste avant de lâchée une petite exclamation ravie en portant son regard sur le plateau. Se penchant sur la table, Mayumi tendit le bras pour se saisir d'un petit gâteau crémeux se trouvant presque sous le nez de Mélia qu'elle dégusta avec toute la patience dont est capable une enfant face à une sucrerie. Un geste qui ne manquerait pas de permettre à Mélia de remarquer les quelques feuilles couvertes d'écritures qui se trouvaient sous le plateau de douceurs. Si elle décidait de s'en saisir pour les lire, il lui serait facile de reconnaître les exacts termes cités quelques secondes plus tôt par Mayumi sinon que la structure des phrases avaient été adaptée au document présent. Il ne manquait plus que la signature de l'alchimiste en bas des trois pages pour accepter.

Mayumi comptait donc respecter les termes de son contrat et non jouer avec Mélia avec la paperasse en agitant les contrats telle sa maitresse jouant avec son chien. Car c’était ce point là que Maïa craignait. Aussi bien l’inquiétude que l’atmosphère baissa d’un cran, en admettant que Mayumi ne l’ait pas senti elle aussi. Mélia s’assoie elle aussi avant de piocher dans les gâteaux. Après tout, ils étaient pour être manger n’est ce pas ?

Certes, la première close ne pouvait pas être respecter, il ne fallait pas se faire d’illusion, la société de son père n’existe plus mais il reste le terrain. Et ce terrain, même si il est difficile à la petite bourgeoise de donner un prix fixe dessus si elle se fit aux conseils de son comptable, elle compte bien le refourguer avec un prix au dessus du marché. Il y avait trois closes, deux peuvent être respectés et il semble tout à fait normal qu’elle demande une compensation en échange. Par contre le reste, si la présidente a tenu parole, Mélia va devoir déplacer ses fesses, ou son joli minois selon le point de vue, jusqu’à Hu-beï, qu’elle le veuille ou non. Si ce n’est que ça… Peu être prendra-t-elle le temps de se fournir quelques ingrédients par la même occasion, c’est qu’elle a toujours été intéresser par Oridia ou la région où se situe l’arbre de sang. Par contre niveau prix, cela l’a toujours fait déchanté, peu importe la période où Maïa y a été…

- Si je me faisais pas d’illusion pour le pillage, personne ne pouvait prévoir que les responsables allaient y mettre le feu. J’imagine que la garantie ne peut plus tenir après cela… Comme je vois que vous êtes aux courants de cela, j’imagine que vous ne serez pas contre de racheter ce terrain, au-dessus du prix du marché bien entendu. Ainsi, l’affaire serait close. Sa dernière estimation était de plus de 430 pièces d’or à nue. Vous comprenez, ça m’ennuierait que mon comptable se tourne les pouces pendant mon absence…

Ce n’est pas une grosse perte même si l’achat est au-dessus du marché, il sera surement revendu quelques jours voir quelques semaines plus tard si le gouvernement n’en trouve pas l’utilité. D’un côté, Mélia se fourni un petit pactole le temps qu’elle revienne à Athéïle et d’un autre, c’est un gain de temps car si elle attend le prix pourrait éventuellement baissé. Un risque en effet… Autre avantage et pas le moindre, ça bouclera le bec à Qaelinus. Et autre détail, ça évite de trop abuser de la patience de la Présidente. Car depuis la scène du port, Maïa ne sait plus trop la prendre.

Pendant que la Présidente déguste sa sucrerie telle une gamine, l’Alchimiste lut rapidement les closes des parchemins. Tout lui plaisait, il manquait quelques griffures et il fallait les montrer aux bonnes personnes, c'est-à-dire à Hu-Beï. L’annonce que le bateau partira dans huit heures fit comprendre les raisons de ce soudain rendez-vous. Elle ne put s’empêcher de hausser les sourcils en apprenant cette nouvelle.

- Huit heure ? Moi qui avait prévu de rendre visite à mon fiancé pour un tête à tête romantique à un diner, je crois que c’est raté. J’ai l’impression qu’il faudra que j’écourte ma visite chez lui…

Elle changera de sujet, sa relation avec Anatolus ne la regardant pas trop, même si la Présidente est surement la mieux placée pour lui donner des conseils sur les hommes. La situation était ironique, sachant que Croswell a quatre fois l’âge de la Présidente et qu’elle n’a pour ainsi dire pas beaucoup d’expérience dans ce domaine là. Elle a déjà été marié plusieurs fois mais jouer le rôle de la brave femme au foyer ne l’a jamais emballé. Quand à manipuler les hommes ? Elle s’est toujours contenter de berner en usurpant une identité, rien d’autres.

C’est pendant qu’elle signa et qu’elle enroula l’un des parchemins dans sa poche qu’elle changera de conversation, revenant sur le sujet plus sérieux.

- Marie Quatre-Pieds ? Ce nom ressemble plus à une boutique brique à brac qu’à une société ayant un rapport de près ou de loin aux textiles ou à un comptoir. Elle représente quoi exactement comme boutique ? Et c’est quoi le rapport avec notre accord ?

Autant en profiter pour avoir un maximum de réponses à ses questions, ça l’évitera de passer pour une imbécile une fois sur place en y mettant les pieds.

Mayumi éclate d'un petit rire tandis qu'une lueur de malice fait briller ses yeux. Buvant une gorgée du lait fumant qui se trouvait dans sa tasse, la présidente d'athéïle passa ensuite une petite langue rose corail sur ses lèvres pour en effacer toute trace. Si il n'y avait pas eût ce lait, on aurait presque pût croire que ce geste avait une toute autre signification au regard que portait Mayumi sur Mélia.

- De ce que je sais des hommes, il faut parfois très peu de temps pour s'assurer de leur contentement. Répondit la Présidente Tsuruchi, les yeux toujours animés de cette malice qui la caractérisait tant, puis avec peut-être moins de malice mais toujours amusée, Mayumi poursuivit. Ne vous faites pas d'illusion cependant, vos courbes ne valent pas 430 pièces d'or, autrement vous les auriez depuis longtemps rentabilisées, vous ne croyez pas ? Je peux éventuellement essayer de m'assurer que votre terrain ne restera pas sans acheteur potentiel mais dans ce cas, nous ne parlerions plus du remboursement de votre petit service pour le Joyau mais d'une dette à votre nom auprès de la République.

Mayumi était une marchande à l'esprit vif, probablement bien plus que la plupart des personnes actuellement en vie dans ce monde, ce qui lui valait la place de présidente cette nation athée et marchande qui sortait à présent victorieuse d'une guerre. Une guerre menée par les religions à l'encontre des valeurs de ce pays. Des valeurs aujourd'hui portée par une femme dont les traits étaient ceux de l'éternel rival marchand et maritime, Hù-Béï. Et c'était dans cet empire féodal que la présidente souhaitait que Mélia aille chercher cette boutique. Boutique de bric-à-brac ou alors ?

- Cette boutique est celle d'une amie très chère. Elle acceptera d'aider quelqu'un que je lui envoie personnellement. Elle n'est pas tant versée que cela dans les textiles que dans la connaissance d'un marché qui vous est inconnu et de ceux qui représentent le domaine qui vous intéresse. Je vous conseil d'ailleurs de la traiter avec le plus grand respect et intérêt car même si c'est une femme du commun en comparaison de ce à quoi vous pourriez avoir l'habitude ici, son cœur est d'or et ses conseils sont autant de pierres précieuses, surtout pour une personne aussi jeune que vous.

Mayumi avait une affection prononcée pour cette personne et faisait assez confiance à Mélia pour s'approcher d'elle. Peut-être que finalement pour réussir dans la vie, il suffisait d'avoir un joli minois et des courbes avantageuses ? Cela semblait être le cas mais au moins l'alchimiste savait à qui elle avait à faire. Il s'agissait tout simplement d'un contact et d'une aide technique sur le terrain pour aborder ce marché et la réouverture d'une voie commerciale. Mais sans réellement s'en préoccuper plus longuement, Mayumi se leva de sa chaise en s'étirant si forte que sa veste et sa chemise remontèrent, révélant son ventre plat à la couleur presque aussi claire que son visage. Puis, déposant un baiser sur son index et son majeur, la présidente lança un baiser à Mélia avant de déclarer.

- Si vous devez prendre ce bateau et voir votre doux promis, alors peut-être devriez-vous vous hâtez. De plus, j'aimerais avoir l'occasion de prendre un bain avant ce soir. Vous retrouverez surement la sortie ma très chère.

Puis, pivotant presque de façon dansante dans ses bottes d'équitation, Mayumi s'en alla d'un pas plein d'entrain en direction des grandes baies vitrées où l'on retirait encore les dernières traces de fortifications laissant seule Mélia avec les contrats et les sucreries.

Une toute autre signification… Depuis le temps que Mélia se pose des questions sur Mayumi et la considère plus comme dérangée que tarée, plus rien ne l’étonne. Elle considérera donc qu’il y a un double sens dans ce qu’elle vient de voir à l’instant mais ne sera guère choquer. Ou plutôt ne sera plus choquer vu la situation. Quand à devoir quelques choses à la République d’Athée, à éviter aussi, pour ne serait ce que pour éviter d’être le jouet de la Présidente quand cette dernière se sera lasser de Cathérina.

Ses courbes vite rentabilisées ? Elle compte bien de le faire avec Anatolus et même si elle risque d’être un peu étourdit sur le sujet, comment pourrait-on lui en vouloir ? Elle a un corps d’une jeune fille et Marcus étant vieux jeu sur les traditions, Mélia n’a donc connu personne. Ce n’est donc pas un crime de faire mariner quelques temps son fiancé en jouant les jeunes vierges effarouchées un peu maladroite, bien que le côté maladroit, elle n’aura pas besoin de beaucoup se forcer. Si il est trop saoulant après le mariage? L'Alchimiste avisera le moment venu.

La discussion se terminera avec une Alchimiste plutôt perplexe car l’envoyer à l’étranger pour avoir des conseils et éviter ainsi de mettre la clé sous la porte n’est pas vraiment à ce que quoi elle s’attendait. Mais elle n’insistera pas davantage sur le sujet. Pourquoi pas après tout ? On lui finançait le voyage et son domaine était géré convenablement, que demander plus ? Et puis cela devait bien faire 40 ans qu’elle n’avait pas remis les pieds à Hù-Béï.

-Bien, je vous remercie de cette entrevu Madame la Présidente.

Cette dernière laissera seul l’Alchimiste à la table, son garde finissant par revenir de lui-même, elle avala une des sucreries présentes sur le plateau avant de décider.

-Je pars pour Hù-Béï dans huit heures. Ca me laisse tout juste le temps de rendre visite à Sorquellos puis me préparer.

Mettant de côté la question de sa réelle présence à Hù-Béï, elle se posera sur des questions sur ce que devient son fiancé. Parce qu’à part guerroyer avec sa petite armée et les quelques lettres qu’il envoie pour donner de ses nouvelles, juste par principe de politesse, Mélia a rarement des nouvelles de lui.

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