Quel type d'animation trouver pour une soirée lorsque votre plan gît dans une mare de son propre sang ?

Megar Orïs, nouveau venu dans la cité, organisait une soirée prévue pour le lendemain et un problème s'imposait à lui : il n'avait toujours pas trouvé d'animation digne des personnes qu'il avait invité. Même si le doute pouvait être permis quant à la venue de certains, tel que le Général Sennachérib ou la Seigneur Marchande, d'autres invités seraient présents et Megar ne pouvait se permettre de montrer cette défaillance dans son organisation. Tout se déroulait pourtant très bien jusqu'à ce que ce ménestrel ne trouve rien de mieux à faire que de se saouler dans une taverne et de déambuler dans les quartiers les plus dangereux de la ville, avant d'être retrouvé au petit matin, quelques litres de sang en moins dans le corps.

Cet homme était bon mais stupide. Dans un sens, cela équilibre l'ordre dans lequel je commençais à me trouver... Bien que se soit un léger chaos, c'est toujours ça dans la balance. Maintenant, voyons ce que cette ville a à nous offrir en matière de talent.

Dans ses habits noirs, Yukihana à la ceinture, le regard balayant l'ensemble de la rue, le marchand Orïs était à la recherche d'un artiste, un vrai. Un capable de respecter l'engagement prit : celui de divertir des nobles pendant toute une soirée sans que ces derniers ne se lassent. C'était une tâche bien compliquée que de trouver cette personne pouvant correspondre aux critères que demandait Megar. Ce dernier avait déjà traversé l'ensemble des tavernes du port à la recherche d'un artiste itinérant, mais aucun d'eux n'avait eu le talent nécessaire pour le satisfaire. C'est ainsi qu'il s'était retrouvé à remonter la grande rue marchande. Cette rue si particulière, où de nombreux étalages étaient présents, où des centaines d'articles s'étalaient jusque sur le sol. C'était d'ailleurs dans cette même rue que le général aurait procédé à une interpéllation de passant. Dans cette même rue où le Roi de la Coupe aurait été aperçu accompagnée de la Reine...

Une mission risquée que ma confié mon Roi. Trouver la source du Chaos naissant dans cette cité et l'éliminer. Si en plus je pouvais régler son compte au Roi de Coupe... Mission très risquée pour un Chevalier seul...

Alors qu'il achetait une pomme (c'est l'avantage d'habiter la capitale du commerce du monde connu, il y a toujours ce que l'on cherche même si ce n'est pas la saison), Megar repéra un homme près d'une fontaine. Cet homme portait un instrument de musique : une harpe apparement. Tout en mangeant sa pomme, Megar détailla le jeune homme visiblement musicien.

Un homme habitué à marcher, pas à se reposer dans les grandes maisons et à flâner en permanence. Il ne s'agit donc pas d'un noble jouant de la musique. Un bel homme, ce qui est un plus dans sa profession... Mmh... Reste à savoir si son talent est au diapason de sa présentation.

Comme à son habitude dès qu'il s'agissait de conclure une affaire, Megar adopta son masque d'impassibilité avant de s'approcher du jeune homme.

- Excusez-moi de vous interpeler de la sorte, jeune homme. Mais par la plus grande chance, seriez-vous musicien ? Je suis à la recherche d'un talent pour une soirée que je donne demain et vous voyant avec votre instrument accroché dans votre dos, je me disais que vous pourriez être à la recherche d'un travail. Si c'est le cas et que vous remplissez mes critères, alors je pourrais vous offrir le gite et le couvert ainsi qu'un salaire correct... Avec tout cela, j'en ai oublié de me présenter. Je suis Megar Orïs, marchand de son état et nouveau venu dans cette cité.

Megar s'inclina légerement en signe de salue ce qui, du haut de ses deux mètres, revenait à se baisser pour se mettreà la hauteur de son interlocuteur. Toujours habillé de son masque de cire, Megar attendit la réponse du musicien.

C'était décidément une bien belle journée qui se présentait. Assis au bord d'une fontaine aux eaux claires, je regardait les gens déambuler dans la cité d'Athéïle, insensibles qu'ils étaient au magnifique ciel bleu de ce jour de début de printemps où voletaient paresseusement quelques nuées d'oiseaux. Oui, vraiment magnifique. J'ai cessé d'observer les gens pendant un moment afin de me concentrer sur l'état de ma harpe au cas où un contrat me tomberait sur les bras. Ma flûte et mon harmonica, ce petit instrument que j'avais ramené des îles elfiques lors d'un de mes voyages, étaient plus faciles à entretenir mais il faut dire aussi que je préfèrais tout simplement me servir d'une harpe. C'est donc tout naturellement que j'ai posé mon étui sur mes genoux et que j'en ai sorti mon instrument, le vérifiant sous tous les angles, tirant tantôt un chiffon pour l'épousseter, tantôt un pain de cire pour relustrer un endroit que le voyage jusqu'à la république d'Athe avait terni.
Je me suis alors mis à jouer, tirant quelques notes au hasard pour vérifier si elle était bien accordée, mais c'était le cas et j'ai alors abandonné l'examen des chevilles pour laisser mes mains papilloner un peu sur les cordes heureux de sentir leur acier fin vibrer sous mes doigts. Les badauds ne se retournaient pas, ne prêtaient guère attention à la méodie totalement improvisée qui jaillissait de l'union invincible de mes gestes et de mes envies.
Je me suis arrêté. Un homme venait vers moi, arborant une impassibilité professionnelle. De nombreux choix se sont offerts à moi lorsque j'ai essayé de deviner son statut social et, quand mes yeux se sont posés sur son sabre, il ne m'en restait que deux. Soldats de la ville, auquel cas il venait m'empêcher de jouer, ou bien marchand, car seul un marchand peut afficher ainsi l'inexpressivité lorsqu'il veut vraiment conclure une affaire. Sa voix s'est élevée et mon premier choix s'est dissipé dans la brise de ce petit matin.
Marchand.

- Excusez-moi de vous interpeler de la sorte, jeune homme. Mais par la plus grande chance, seriez-vous musicien ? Je suis à la recherche d'un talent pour une soirée que je donne demain et vous voyant avec votre instrument accroché dans votre dos, je me disais que vous pourriez être à la recherche d'un travail. Si c'est le cas et que vous remplissez mes critères, alors je pourrais vous offrir le gite et le couvert ainsi qu'un salaire correct... Avec tout cela, j'en ai oublié de me présenter. Je suis Megar Orïs, marchand de son état et nouveau venu dans cette cité.

Je l'ai regardé un instant, lui ai sourit, puis j'ai serré samain, me suis relevé et l'ai salué à mon tour d'une révérence de cour démérienne d'une profonde sollenité.

- Effectivement, ai-je dit, je suis barde itinérant et je me suis arrêté à Athéïle pour les jours à venir, mais je ne m'attendais pas à trouver en si peu de temps de quoi vivre. Le gîte et le couvert jusqu'à quand ? Je n'ai nulle d'autre où aller en priorité, alors si vous avez dans l'idée d'organiser plusieurs recption de ce genre, je suis votre homme jusqu'à ce que vous en décidiez autrement. Pour vous faire une idée de mon talent, afin que vous n'ayez pas de mauvaises surprises demain, je propose que vous alliez vous asseoir à la terrasse de cette auberge par exemple, puis de me faire signe lorsque vous voudrez m'engager, ou que vous déciderez que je ne suis pas la bonne personne pour votre fête. Je jouerai jusque là. Cela vous va-t-il ?

Puis j'ai émis un sifflement court et une ombre s'est glissée en silence jusqu'à nous. Tebahn, mon chien-loup. J'ai reporté mon attention sur mon interlocuteur, attendant sa réponse. C'était décidément une bien belle journée qui se présentait.

- La durée de ce contrat dépendra essentiellement de votre talent et de l’effet que vous produirez à cette soirée… Si vous vous avérez suffisamment doué, je pourrais décider de vous garder plus longtemps à mes côtés en échange d’un peu de musique et de chant quand je le souhaiterai.

Le barde proposa de lui-même de faire une démonstration de ces talents. C’était parfait. Ainsi, Megar pourrait se fier non seulement à son avis mais aussi à celui des passants. Puis le jeune homme siffla et quelque chose effleura la jambe du marchand. Mettant la main au sabre, Megar ne dégaina cependant pas lorsqu’il vit que ce mouvement avait été causé par un chien loup. Relâchent la pression exercée sur son arme, il s’agenouilla face à l’animal et plongea son regard dans les yeux jaunes de ce dernier.

Après quelques instants, il se releva et se tourna vers le ménestrel aux yeux couleur miel.

- On dirait deux frères… J’accepte votre proposition jeune homme mais plutôt que de vous écouter de plus loin, je vais prendre plusieurs positions, plus ou moins éloigner afin de juger de votre talent et d’observer les réactions des passants. Ainsi vous n’avez pas un juge mais des centaines. Commencez lorsque vous êtes prêt que nous décidions si vous méritez de paraître à une soirée où de grand noms seront représentés.

Sur ces paroles, Megar se fondit dans la foule et disparu de la vue du ménestrel. Mais que ce dernier ne se trompe pas. Le marchand était là, les oreilles grandes ouvertes afin d’entendre ces mélodies, les yeux à l’affût de la moindre réaction des gens l’entourant. Si ne serait-ce qu’une personne ne passait à portée de harpe sans se détourner de son chemin pour écouter la vibration de l’air, alors Megar jugerait inapte ce jeune homme.

J'ai hoché la tête. Monsieur était joueur. De nouveau seul à côté de la fontaine, j'ai lentement regardé autour de moi, vérifiant si je ne pouvais pas voir mon futur employeur, puis je me suis levé et j'ai déclamé:

- Mesdames, mesdemoiselles, messieurs ! A la gloire de cette journée, à la gloire de cette cité ! Puissent vos coeur porter l'oreille à ces quelques notes !

Je me suis rassis au bord de la fontaine et j'ai calé ma harpe contre mon épaule gauche, la posant sur mon genou en même temps. Les premières notes se sont élevées, douces et calmes, puis ce fut un défilé de sons tous plus beaux les uns que les autres, chacune des notes s'ajustant parfaitement avec la précédente sans discontinuer. Les passants ce sont arrêtés ne sâchant pas très bien s'ils devaient se joindre au rythme ou se mettre à danser, mais chacun ayant trop peur pour se lancer sans les autres. Ce n'était pas grave.
La musique jaillissait de mes doigts à une allure puissante, entraînante, mais j'avais décidé de vrarier un peu mon réperrtoire. Sans crier gare je me suis arrêté de jouer et me suis tourné vers les badauds.

- Mesdames et messieurs, pour vous, voici la Ballade des Pélerins !

J'ai ri intérieurement. Je me fichais de savoir si ces hommes et ces femmes connaissait la plus belle et la plus ancienne des chansons de voyage, et je voulais surtout me faire plaisir, comme pour rendre hommage à ce jour merveilleux et à ce soleil radieux. J'ai entonné ce chant de ma voix claire de baryton enchaînant les vers sans que mes doigts ne s'égarent ailleurs sur les cordes que là où je l'avais décidé. Mon instrument vibrait tranquillement contre ma poitrine et la musique emplissait l'air de la place d'une harmonie, d'une douceur, presque palpable.
Les passants, emportés par ce chant aux accents de vie et d'amour, se mirent à claquer dans leurs mains au rythme de la mélodie, mais mes mains ne flanchaient pas pour autant.
Au bout d'une bonne demi-heure, lorsque la ballade s'acheva sur un couplet lent, plein de paix et de force, je crus même en avoir entendu pleurer. Sur les paroles emplies de tristesse, sur la force de ces pélerins, sur la musique bien sûr.
J'ai souri à la foule et, tout en posant ma harpe, tiré de mon sac un petit instrument de bois et de métal percé de trous et gravé avec finesse. Mon harmonica s'éveilla au contact conjugué de mes mains et de mes lèvres, distillant dans l'air sa mélodie vivifiante, et dans l'assistance, certains se mirent à danser sans attendre, transformant cette place d'Athéïle en véritable carnaval. A un moment, quelques musiciens passant par là se joignirent à moi et la foule redoubla d'ardeur, mais ils s'en allèrent vite et je me suis encore retrouvé à jouer seul pour tous.
Je m'en fichait, je pouvais jouer ainsi tout le temps que je voulais.

Le ménestrel était tout ce qu’il y a de plus talentueux. En tant que marchand, même si cette profession était récente, Megar avait appris à ne se fier qu’à ce qu’il avait sous les yeux. Et ce qu’il voyait en ce moment dépassait toutes ses espérances. Une foule de passants amassés autour du jeune homme en train de jouer. Puis la mélodie changea pour devenir une chanson que Megar avait déjà entendu par le passé : La Ballade des Pèlerins. Toutes les personnes qui entendaient sa musique semblaient devenir très réceptive à l’histoire de cette mélodie. Lorsque le rythme était joyeux, tous semblaient rire et lorsque le rythme ralentissait pour devenir sombre, les spectateurs semblaient plonger dans une terrible mélancolie.

Heureusement pour Megar, il s’en était rendu compte très vite. Ce ménestrel semblait pouvoir influencer les émotions humaines par la simple vibration de quelques cordes tendues. La main dans une poche de son manteau sombre, une lame apparue. Représentant un homme appuyé sur un bouclier, un sceptre dans une main et une sorte de sphère posée au sol. Quelques secondes passent et la lame devient blanche. L’image à disparue et les émotions ressentit par le marchand refluent pour laisser place à son calme habituel et à son stoïcisme caractéristique.

Un pouvoir bien dangereux que cette musique… Mais tant qu’elle reste entre les mains d’un simple ménestrel, cela ne pose sans doute pas de problème… Bien, je peux dire qu’il a passer le test avec brio.

Fendant la foule rassemblée, le marchand s’approcha de la fontaine et s’assit à côté du jeune homme en attendant qu’il termine son morceau. Plus le temps passait, plus la foule s’épaississait et plus il serait difficile de la faire se disperser. À l’instant où les dernières notes vibrèrent, Megar se leva et s’approcha du jeune homme. Dans sa poche, l’image sur la lame réapparu avant que la lame ne disparaisse à son tour. Sortant sa main de la poche, il la tendit au ménestrel :

- Si votre répertoire est suffisamment vaste pour divertir des nobles aussi bien que des passants, alors je vous propose un contrat. Pour le reste des termes du contrat, nous en parlerons chez moi si cela ne vous dérange pas… Bien sûr, votre compagnon peut nous accompagner.

La musique avait remplacé le bruit sur cette grande place de la cité d'Athéïle et j'en étais peut-être plus enchanté que les autres car c'était moi et personne d'autre qui avait fait naître cette douce et entraînante mélodie, c'était mes doigts qui avaient réveillés les cordes de ma harpe et les formes de mon harmonica qui sommeillaient depuis mon arrivée en Athe. Chaque note revêtait pour moi la force de la joie et de la vie, la force du bonheur. Je ne fus, et je suis tout ce qu'il y a de plus modeste, peu surpris de voir mon futur employeur revenir vers moi peu de temps après que j'eûs tiré les dernières notes de mon petit instrument percé. Cela avait été rapide.
Alors qu'il ne se trouvait plus qu'à un souffle de moi, il me dit calmement:

- Si votre répertoire est suffisamment vaste pour divertir des nobles aussi bien que des passants, alors je vous propose un contrat. Pour le reste des termes du contrat, nous en parlerons chez moi si cela ne vous dérange pas… Bien sûr, votre compagnon peut nous accompagner.

Beaucoup trop calme d'ailleurs. J'ai sus dès cet instant que mon interlocuteur n'était pas ce qu'il paraissait être car n'importe qui appartenant au commun des mortels était sensible au charme de mes notes, parfois même quand je ne distillait pas le pouvoir de mon don dans ma musique. Seuls les gens sans coeur, ou possédant un excellent moyen de se protéger de ce genre d'atteintes, même minimes, à leurs émotions, pouvaient rester aussi calme après que j'eûs exécuté la Ballade des Pélerins. Bizarrement, je penchait plutôt pour la deuxième solution car le Marchand Orïs m'était assez empathique malgré son apparente austérité. Mais après tout, à chacun ses petits secrets.
Je lui ai retourné un sourire éclatant et ai déclaré:

- Je vous remercie pour les compliments que vous n'osez formuler et qui brillent pourtant au travers votre rapidité à revenir vers moi, mais également pour cette offre généreuse car je n'aurais vraiment eu aucune envie de laisser Tebahn dehors si j'avais été au chaud dans votre demeure. J'ai remarqué avec déception que j'ai oublier de vous donner mon nom lorsque nous avons défini les règles de notre petit jeu, aussi permettez-moi de me présenter. Je me nomme Dimgar Ballahd, mais je me passerai bien que vous usiiez d'autre chose que de mon prénom lorsque nous nous adresserons l'un à l'autre. Je préfèrerais également vous tutoyer car le vouvoiement installe trop de distance entre deux perosnne, ce qui n'est vraiment pas pratique pour marchander, ou même simplement discuter. A présent, si tu veux bien nous ouvrir la voie, je te suis volontiers jusque chez toi cher ami.

J'ai siffler et Tebhan s'est redressé, puis j'ai remis mon harmonica dans mon sac de voyage et me suis saisi de mes affaires avant de me tourner de nouveau vers Megar.

- On y va ?