Manoir des Valern

C’est avec un certain effort que Mélia rouvrira les yeux avant de prendre son courage à deux mains et se retourner en direction de la fenêtre. Beau temps pensera-t-elle avant de se rendre compte qu’elle avait changer de lieu depuis la dernière fois qu’elle s’était réveiller. Où était-elle déjà ? Au Palais Présidentiel ? A son retour du Port après la négociation, elle avait commencé à prendre son mal en patience en apprenant que les armées de religieux se dissipaient petit à petit mais surement et que ce n’était plus qu’une histoire de jour avant qu’elle ne soit définitivement vaincu. Bien sûr, Mélia est passé voir ses domestiques pour leur donner un bref compte-rendu de la situation, se contentant de dire ce qu’Athé lui avait autorisé de répété. Cela aura eu au moins le mérite de l’occuper quelques heures. Le restant ? Avec les ressources infinis d’Athé, elle aurait pu se faire un réel plaisir mais pourquoi prendre le risque de voir les services secrets fouillé ce qui ne les regardaient tout en sachant qu’elle ne pourrait même plus tester ses inventions directement sur des sujets non consentant comme des fanatiques toquant à la porte du Palais ? Mélia est loin d’être bête, le service d’espionnage à fouiller son laboratoire et même si rien n’a disparu, quelques fioles ont été déplacé et pour quelqu’un qui a toujours travaillé dans le bazar et sachant exactement où elle pose son matériel, même les meilleurs espions se feront avoir. Si cela peut leur faire plaisir, Mélia n’a rien d’utiliser de si exceptionnel et la formule du « coupe-sommeil » est utilisé parfois par certains Alchimistes. Si la jeune fille est loin d’être bête, le services d’espionnage aussi, surtout celui d’Athé qui a dû se rendre compte qu’il y avait surement anguille sous roche qu’une mioche possède le niveau d’un initié ayant une quinzaine d’années d’expérience. L’idée de fouillé ses affaires les ont démangé ? Bonne chance, chaque Alchimiste codent leurs notes à leur façon et ce n’est surement pas en quatre jour qu’ils comprendront la manière de décoder les notes à Maïa.

Bref, Mélia passera les quelques heures au laboratoire pour se créer quelques vitamines de seconde zone pour son futur coma. La suite, elle la passera dans une suite réservé aux diplomates étrangers et elle suivra les cries de joie de la population d’Athé dans un sommeil profond. Au moins, c’est le lit confortable qu’elle aura le droit et ne récupérera pas un mal de dos atroce à son réveil.

Car voilà, ça fait quatre jours qu’elle est coincé au lit et c’est seulement après quelques minutes pour se réveillé correctement qu’elle se rendra compte qu’elle est au manoir de son père. C’est sa chambre bien que le décors ait beaucoup changé depuis la dernière nuit qu’elle avait passé ici avant la tempête. Les vitres brisées par la tempête ont été réparé rapidement et il y a encore quelques traces d’humidité. Quand à savoir si ce lieu a été attaqué autre qu’avec les éléments de la nature, difficile de se faire une théorie rien qu’à une pièce. Le manoir a été attaqué ? Aucune idée et de toute façon elle risque d’avoir un compte rendu quand elle se réveillera. C'est-à-dire pas avant quelques heures !

Avalant une dernière fiole de vitamine, elle finira par enfiler la robe de chambre non loin du lit replié sur un des meubles. Sur le coup, elle pouvait remercier l’absence de domestique qui ne lui aurait que conseiller de rester coucher. Mélia ne voulait qu’une chose, se dégourdir les jambes, peu importe la présence de courbatures. Elle ne fera aucune remarque concernant ce point quand elle sortira et quand on l’accostera, ne serait ce que pour éviter des conseils dont elle se passerait bien. Son petit-déjeuner ou déjeuner, car n’ayant aucune idée de l’heure qu’il pouvait être, elle le prendra à une table et surement plus dans un lit avant un bout de temps ! D’ailleurs, rien ne vaut un bon repas pour se mettre à jour au nouvelle d’Athé mais aussi de la situation des Valern. Car si la situation d’Athé n’est guère favorable ces derniers jours, ce n’est guère mieux pour la maison des Valern. Avec un peu de chance, elle aura peut-être des nouvelles de Marcus, si sa mort l’arrange concernant l’héritage, il est un bien en affaire que Mélia qui risque de paraître bien trop jeune si jamais elle doit renier avec les associés son père. Normalement, elle a largement de quoi se faire une petite fortune dans les mois à venir à moins que la Présidente se mette à simuler un Elsheimer quand ça l’arrange.

Quel était l'état d'Athéïle ? De ce que pourrait en voir Mélia depuis les fenêtres du Manoir de Marcus, une fine couche de neige recouvrait les endroits où l'activité humaine ne l'avait pas fait fondre. La vie semblait avoir reprit son cours, presque comme si de rien était. Les rues étaient moins bondées peut-être. Les gens semblait plus prudents, peut-être. Mais il était certains que nul n'oubliait cette guerre qui secoua la ville et qui se poursuivait encore dans les ombres des ruelles. Avant qu'elle ne dorme profondément des suites de l'usage de ses propres drogues, Mélia aurait été mise au courant de divers informations, une discutions saisie au vol par ci, une question par là. Les brumes du sommeil se dissipant, elle pourrait à nouveau accéder à ses souvenirs. Oui beaucoup d'Originels n'avaient pas été retrouvés. Certains s'étaient suicidés collectivement, ancien soldat du Joyaux convertit de force, ils avaient trouvé pour seule amende honorable la mort qui laisserait l'histoire les oublier. Mais pas tous. Des centaines de soldats avait été convertit par les deux religions et autant de civils. L'armée du Changement, entièrement rassemblée, avait été défaite et peu de prisonniers avaient été fait dans la rage des combats. Les Originels cependant, occupant le quartier de la terre, s'étaient presque évaporer lorsque les premiers flocons étaient tombés sur la cité. Quelques dizaines avaient été capturés mais il en restait encore. Certains étaient restés dans la ville, c'était la rumeur qui circulait. On parlait de nombreux combat nocturnes dans les parties les plus isolées de la ville, de morts retrouvés au petit matin sous une fine couche de neige rougie. Résultats d'une criminalité de désarroi d'après-guerre ou réels fanatiques ? Mélia l'ignorait et personne n'aurait pût l'informer jusqu'à présent.

Le Manoir en lui-même ne semblait pas avoir subit de dégât à l'étage mais des serviteurs pouvaient très bien avoir tout remis en ordre. Après tout, la jeune alchimiste n'était pas arrivée ici par enchantement. Lorsqu'elle descendrait pour aller dans la salle à manger, elle pourrait cependant que la lourde porte de chêne n'était plus. Une porte faite d'un bois de piètre qualité l'avait remplacée et des entailles sur la rampes de l'escalier et de discrètes marques sur les tentures indiquaient clairement un combat. Personne dans la salle à manger, ni même un plat. Mais l'odeur d'un gruau s'échappait de la porte discrète qui donnait sur la cuisine et permettait habituellement aux serviteurs de servir leurs maîtres. Derrière cette porte, la salle faite de pierre apparentes qui constituait la cuisine était illuminés par la lumière d'une vaste cheminée qui aurait pût accueillir plusieurs larges marmites mais où un seul feu brûlait, ainsi que part une mince mais longue fenêtre proche du plafond que la neige avait entièrement couverte. Au centre de la pièce, une table de bois et des bancs où une vingtaine de personnes auraient pût se tenir sans ce gêner mutuellement, accueillaient ce qui ressemblait au personnel restant de la maison Valern. Trois gardes, dont un borgne, un domestique et une femme de chambre ainsi que le petit garçon de la défunte matrone qui commandait autrefois aux cuisiniers de la maison. Tous déjeunaient en silence d'un bol de gruau et lorsque Mélia entra dans la pièce, ils se tournèrent vers elle et l'un des gardes qui avait suivit Mélia jusqu'au palais ainsi que la femme de chambre se levèrent.

Le premier avait les sourcils froncés tandis que la deuxième s'approcha de sa maîtresse avec une lenteur née de la douceur fragile qui habitait cette femme.

- Madame, voulez-vous que je vous apporte un bol de gruau dans la salle à manger ? Ou peut-être autre chose ?

Le garde, sans ses armes et l'armure flamboyante confiée par le Palais Présidentiel était peut-être moins impressionnant qu'auparavant mais ses épaules larges et son corps sculpté ne mentaient pas sur la nature de son travail, de même que la tunique marquée du blason de la famille Valern au-dessus de son cœur. Il serait cependant aisé de remarquer la récente estafilade qui courrait du coin de son œil droit à la commissure droite de sa bouche. Il restait à observer la dame en silence, attendant qu'elle dise quelque chose, à lui ou la femme de chambre.

C’est vrai que le chaos d’après-guerre n’aide en rien, la situation sera surement clarifier quand l’ordre finira par revenir dans les mois à venir. Fanatiques ou criminalité galopante d’après-guerre ? Mélia rajouterait même une troisième cause vu que les pirates en ont pour un mois le temps de réparer leur navire ou de reformer leur équipage. En fait, l’Alchimiste pencherait pour ses trois causes tout simplement mais elle ne s’attarda pas plus sur ce problème pour la simple et bonne raison que ce n’est pas son problème. Du moment qu’elle peut retrouver son petit quotidien tout en s’enrichissant pour monter ses futurs projets, c’est tout ce qu’elle demandait. Et pour ses projets, il lui fallait du pouvoir. C’est fou, l’humanité a toujours rechercher d’avantage de richesses ou de pouvoir et venant d’une humaine qui a vécu suffisamment longtemps pour juger sa propre race, elle leur ressemble en tout point.

Descendant les marches, elle aura confirmation qu’il y avait bel et bien eu un combat et à voir la lourde porte en chêne absente, il a surement été déséquilibré. Son père est soit mort, soit pire encore : converti de force. Ce dernier point est plus problématique car si elle peut plaider à la folie et monter à la tête de la maison Valern, qui sait ce que l’Origine ou le Changement lui a fait rentrer dans le crâne ? La vérité sur son identité ? Maïa ne sous-estime pas les Dieux et a passé sa vie à les défier.

L’odeur du gruau finira par la mené au cuisine où elle verra son personnel au grand complet. Enfin grand complet c’est vite dit, le trois quart est décédé lors de la traversée de la ville et il va falloir pensé sérieusement à embauché si elle veut que le manoir soit bien entretenu. Ce point attendra le temps que les comptes ne seront pas au vert. Le second point, plus gênant, Mélia n’a jamais été à l’aise dans les longs discours et il va falloir trouver les bons mots. Elle pourra remercier sa servante d’avoir brisé ce silence.

-Oui merci Miranda.

Dans la salle à manger, ça risque d’être guère mieux. Les serviteurs n’ont jamais déjeuné avec le personnel, c’est un fait, peu importe les us et coutumes des régions. Là comme son père n’est plus là, ça risque d’être encore pire niveau ambiance dans la salle à manger. Elle finira tout de même par dire aura chose, la question qui finira de toute façon par tomber d’un moment ou un autre.

-Et est ce que vous avez des nouvelles de mon père ?

Mélia n’y croyait plus trop mais autant la dernière fois elle s’était entêter de le croire vivant tant qu’il n’y avait pas de cadavre. Autant maintenant les serviteurs ont peu être enterré Marcus pendant que sa fille était dans le coma. Et à voir son garde froncé les sourcils et qui semblait hésité à dire quelques choses, plus les secondes passait plus cette éventualité se renforçait.

Miranda fit une courbette rapide avant d'aller à petit pas pressés chercher le bol qu'elle remplie d'une louché de gruau fumant tirée de la marmite qui chauffait dans la cheminée. Elle posa ensuite le bol sur un plan de travail et y découpa quelques morceaux de lards et de fromage, probablement afin de donner, à ce plat de la plus grande simplicité, un goût un peu plus agréable pour la jeune fille. Elle posa ensuite le bol sur un plateau auquel elle ajouta une carafe d'eau claire et un verre mais au moment de saisir le plateau pour l'emmener dans la salle d'à côté, le garde s'était approché et posa une main sur son poignet faisant tressaillir la jeune femme. Elle s'écarta et retourna à sa place tandis que le garde prenait le plateau et se dirigeait vers la salle à manger. Il ouvrit la porte en la poussant de son dos et posa le plateau en bout de table avant de tirer la chaise pour que la demoiselle de la maison Valern puisse s'assoir.

- Mangez madame, nous parlerons après. Déclara l'homme tout en tirant une chaise à la droite de la jeune fille et en s'y asseyant.

L'odeur de la nourriture se répandrait rapidement, transportant l'arôme du lard et la saveur fondante du fromage qui se mélangeait à l'épaisse soupe de blé que constituait le gruau. De quoi éveiller l'appétit d'un mort, surtout lorsque l'on se lève après un aussi long sommeil. Pendant ce temps, le garde resterait de marbre et aussi silencieux qu'une tombe. Même son souffle ne perturberait pas le repas de l'alchimiste. Lorsque le bol aurait été vidé, le garde n'attendrait pas que la moindre question mais déclarerais :

- Antonin, le garde qui à perdu son œil, il était resté avec votre père lorsque nous sommes partit nous réfugier au Palais Présidentiel. Il était encore au milieu des morts lorsque nous sommes arrivés. Nous n'avons pas retrouver Monsieur Marcus parmi eux mais Antonin nous à dit l'avoir vu vendre chèrement sa peau. Je suis désolé Madame, il n'y avait pas de corps à enterrer mais nous avons planter une pierre tombale à l'arrière du jardin en souvenir de sa mémoire. Je suis désolé, répéta le garde, l'air réellement triste. Il vous faudra cependant être forte madame, votre père tenait à cœur la gestion de ses affaires et de tout ceux qui sont restés derrière, vous êtes la seule capable de gérer une telle fortune et les créanciers de votre père n'attendront pas la fin de votre deuil pour venir réclamer leurs dus.

Le garde se tût. Son visage était marqué par la fatigue des derniers jours mais il était malgré tout tiré à quatre épingles, son uniforme sans le moindre plis et sa barbe parfaitement rasée malgré l'estafilade qui marquait son visage. Il était temps que l'héritière de son employeur vienne le soulager d'une partie des responsabilités qu'il avait dû assumer pendant qu'elle en était incapable.

Mélia soupira, elle s'y attendait même si elle aurait préféré qu'ils retrouvent le corps, ne serait ce que par principe et avoir la certitude de la mort. Mais après tout, des disparus ne sont pas ce qui manque durant une guerre, surtout une guerre civile. Elle devra se contenter de cette version. L'Alchimiste soupira, soupire qui marqua une certaine tristesse même si elle aurait pu jubiler en temps normal. Certes, elle a l'héritage mais vraiment au mauvais moment. Le garde pourra voir cette tristesse même si elle a une toute autre définition pour lui.

- Je m'y étais préparé, j'ai eu le temps d'y réfléchir... Pour les vautours qui attendent au coin de la porte aussi. Je crois que j'ai bien fait d'être prévoyante sur ce dernier sujet. J'irais sur la tombe de mon père après le diner.

Elle mangea quelques cuillère de gruau dans le calme avant de reprendre. L'odeur a beau être appétissante, l'estomac n'attendant qu'à être rempli, l'envi était absente. Elle se força tout de même pour récupéré des forces.

- Vous enverrez le domestique prévenir le comptable de Père que je veux le voir le plus rapidement possible. J'imagine qu'il a déjà fait le tour de la manufacture et commencé à dresser la note sur ce que ça va me couter. Ça me permettra de faire le point avec lui.

De nouveau un silence pendant qu'elle engloutit une partie du bol. Ce qu'elle venait de dire paraissait on ne peut plus logique. Si la manufacture tournait sans qu'elle n'est rien fait, cela devait surement être au ralenti mais elle en doutait fort. Cela fait à peine quelques jours que l'activité d'Athéïle a repris.

La suite fut un peu plus étrange. La Présidente lui a promis certaine chose, Mélia allait lui réclamer. Elle n'a pas été nécessairement gourmande dans ses demandes mais cela devrait lui suffire largement. La garantie lui permettrait de trouver des fonds sans s'endetter, les parts lui permettront d'être indépendante dans le domaine du transport. Quand à certains droits d'exclusivités, c'est l'arrêt de mort pour ses concurrents. Et même dans le pire des cas, des parts et des droits ça se vends. Surtout des droits d'exclusivités ! Mais cette idée est à utilisé en dernier recours, une solution temporaire et elle finirait par perdre son petit train de vie quotidien bien confortable.

- Ensuite, il ira au palais pour qu'il me prenne rendez-vous avec Madame la Présidente. On s'est mise d'accord toutes les deux le soir où je me suis séparé de vous: j'ai tenu ma part du marché, elle n'a plus qu'à tenir la sienne. Je pense qu'elle ne peut pas refuser un rendez-vous d'une demi-heure même si elle doit être occupé ces derniers jours.

- Bien madame, répondit rapidement le garde avant de retourner dans la cuisine.

Mélia serait laissée seule face à son repas. Plusieurs heures s'écouleraient avant que ses ordres puissent être entièrement accomplit avec la complète désorganisation de la ville et les routes en mauvais état, la circulation était difficile et rendue dangereux par la criminalité en hausse. Un garde accompagna le domestique jusque chez le comptable, espérant que ce dernier serait en vie car après tout, rien n'était moins sûr. Mais si ce n'était pas le cas, ils avaient fait savoir qu'ils tenteraient de ramener les documents nécessaire à la gestion de la comptabilité, notamment le dernier état des finances de Marcus ainsi que la liste des créanciers qui pouvaient encore en vouloir à la fortune de feu M.Valern. Quand ils revinrent finalement, le visage rougie par le froid et les bas trempés par la neige, ils étaient accompagné d'un homme très grand et mince à l'air dédaigneux et qui, à juste titre, regardait de haut toutes les personnes en présence. Il portait un grand manteau noir et avec le long nez sur lequel il perchait une petite paire de lunette, on aurait dit une corneille. Le domestique prit le manteau de l'homme, lui laissant une mallette et la longue canne d'ébène, manifestement nécessaire pour que ce géant puisse marcher et alla le porter dans un vestiaire en même temps que le sien et celui du garde tandis que ce dernier déclarait d'un air quelque peu... contrit :

- Monsieur le Comptable de votre père...

- Monsieur Qaelinus, coupa sèchement l'homme tout en toisant Mélia du haut du mètre quatre-vingt dix-neuf qu'il devait approximativement mesurer. "J'ai toujours eût plaisir à travailler avec feu votre père, espérons qu'il en soit autant avec vous. Mais je ne me suis pas déplacé simplement pour échanger des politesses. Si vous avez un endroit où nous pourrions discuter je vous en serez gré. Et quelle ne serait pas ma reconnaissance si vous aviez du thé à m'offrir."

Le ton de l'homme était sec, cassant, presque méprisant. A voir l'air agacé du garde, c'était probablement la façon dont Monsieur Qaelinus s'adressait à tout ceux qu'il rencontrait. Rien de personnel donc. Cependant il faudrait effectivement un endroit où discuter puisque parler de la comptabilité au milieu du vestibule, aussi chaleureux et vaste soit-il, n'avait rien de décent et Mélia devrait bien entendu se montrer d'une décence irréprochable à présent qu'elle héritait de la fortune de son père. En effet, à Athéïle, la noblesse appartenait à ceux qui possédait la richesse et pas l'inverse. Bien que Marcus n'ait jamais été un des marchands d'influence majeur, il avait sa propre sphère de contrôle et dans cette sphère comme dans les plus puissantes, l'apparence était un facteur clef. C'était aussi pour cela que Monsieur Qaelinus n'avait pas vraiment à s'en soucier. En tant que comptable, les marchands avaient besoin de lui mais jamais ce métier ne lui apporterai suffisamment pour accéder à une influence marchande quelconque.

Qaelinus... Le peu qu'elle l'a vu ou en entendu parler, Mélia se rappèlera de son ton hautain et dédaigneux. A y repenser, l'Alchimiste s'est toujours demandé comment Marcus a pu le supporter. Certes, il voyait avant tout le professionnalisme et les compétences avant le comportement mais il a toujours été regardant sur le comportement d'autrui. Marcus dans sa jeunesse était plutôt du genre fière et bagarreur, comportement qui lui a valu la mort en s'entêtant de garder son manoir avec une poignée d'hommes. Mais passons, tant que Mélia estime qu'il fait bien la part de son travail, elle n'a aucune raison de le rabaisser et le comparer à un petit comptable de seconde zone. Une chose est sûr, si il ne s'est pas encombrer de politesse, la jeune fille non plus. Un point en commun au moins.

Pour détendre davantage l'atmosphère, elle s'adressa au garde qui fera surement la commission à sa servante. Ça ne sera pas un thé mais deux, Mélia ne disant pas non pour en boire un tranquillement, surtout quand il s'agit de paperasses qui promet de bien être ennuyantes.

- Miranda va nous apportez cela dès que possible. Si vous vouliez bien me suivre, on discutera plus tranquillement dans le bureau.

C'est l'une des rares pièces qui n'a pas souffert de l'attaque. A part quelques éventuelles pillages, qu'est ce que des fanatiques iraient faire dans un bureau? Pas grand chose. Rentrant dans la pièce qui faisait aussi office de petite bibliothèque personnel, elle montra un des fauteuils devant le bureau avant de s'assoir à l'endroit qui lui était destinée.

- Bien monsieur Qaelinus, nous pouvons discuter. Je ne m'attends pas vraiment à de bonnes nouvelles et j'imagine que vous n'en avez pas beaucoup distribuer ces derniers jours à vos autres clients. Même si pour le moment je ne peux que m'appuyer sur les économies que mon père à mis de côté avant le désordre civil provoqué par les religieux, je préfère vous prévenir que d'ici quelques temps j'aurais la main mise sur une certaine somme d'argent. Le problème, cela prendra surement plusieurs jours mais je doute que les créanciers prennent leur mal en patience. Mon principal intérêt est de remettre en marche la manufacture de mon père le plus rapidement possible et ainsi reprendre les expéditions.

On ne peut plus logique. Qaelinus ne doit être guère étonner de cette décision mais il allait surement lui présenter la note salé que cela représentait. Une politique qui, globalement, ne changera pas de l'époque où Marcus s'occupait de gérer la maison Valern. Pour le moment, Mélia ne voit aucun intérêt de changer cette stratégie, pas tant qu'elle n'a pas mis la main sur les garanties et les droits que lui a promis la Présidente.

Mais voilà, malgré des promesses, il est mal vu que la Présidente d'Athée prenne parti. Surtout quand il s'agit de verser directement de l'argent. Maïa le sait et appellerait plutôt cela un "emprunt". Hypothéquer le manoir avec une valeur bien plus supérieur qu'il ne vaut en réalité, c'est ce qu'elle proposera à la Présidente. Avec bien sûr un taux d'intérêt frôlant les 0% lors du rachat peu importe le nombre d'année que prendra le remboursement. Des ennemis, Mélia va s'en faire surtout après cette histoire de droit mais là, c'est snobe, c'est difficile à prouver et ils auront bien du mal à prouver que la Présidente a pris parti pour que l'accord soit caduque.

Qaelinus était un homme fin, presque osseux mais à la poigne puissante il n'était donc pas à l'étroit une fois assit mais quand le comptable s'assied dans le fauteuil, bien que doté d'un haut dossier, ce dernier semble trop petit. Mais l'homme ne s'en formalise pas, comme habitué à cette situation. Il laisse Mélia parler tout en déposant sa mallette sur le bureau et en l'ouvrant. Il en sort plusieurs piles de documents dont plusieurs présentent des côtés légèrement noircies ou troués comme si ils avaient fait un tour dans un feu de cheminée avant de revenir à la sécurité de la mallette du comptable. Il resta silencieux quelques instants, classant ses dossiers tandis que Miranda apportait un plateau avec deux tasses et l'imposante théière dont s'échappait la vapeur d'eau. Elle versa dans les tasses de porcelaine le liquide, couleur d'ambre à l'arôme épicé avant de découvrir une petite tasse de lait et une autre contenant du sucre blanc en poudre. Après une courbette rapide, la jeune femme se retira du bureau en fermant précautionneusement la porte. Qaelinus avisa l'une des deux tasses, y versant un nuage de lait et une cuillerée de sucre qu'il mélangea avant de les porter à ses lèvres tout en observant les documents qu'il avait amené sur la table. Il reposa ensuite la tasse sur le plateau et prit quelques secondes pour trouver un document dans la pile des plus endommagés par un feu et en sortit un long parchemin presque illisible.

- Voici l'acte de propriété du terrain de la manufacture. Car de bonnes nouvelles, non je n'en ai pas pour vous. La manufacture de votre père à entièrement brûlé dans le conflit et rien n'a pût être récupéré, surement déjà pillé de longue date lorsque le feu à prit. Votre appuie sur les économies de votre père est donc le seul que vous ayez et c'est bien peu. Les banques n'ont pas été épargnées et sur le chemin que j'ai emprunter avec vos serviteurs, j'ai pût avoir un compte rendu de ce qu'il restait. Vous avez en sommes 348 pièces d'or et 7 pièces de Raghen.

Qaelinus marqua une pause, prenant sa tasse et se calant dans le fond de son fauteuil du mieux que le permettait sa hauteur avant de boire une nouvelle gorgée de thé. Il regardait de ses petit yeux gris Mélia droit dans les yeux, faisant tourner, par de petits mouvements contrôlés, le contenu de sa tasse.

-Vos options sont limitées. Vos créanciers ne vont pas attendre et comme vous l'avez dit, vu les difficultés économiques de l'ensemble de la ville si ce n'est les Seigneurs Marchands les plus fortunés, vos créanciers n'attendront pas. Nous pouvons toujours essayer de vendre le terrain de la manufacture et divers éléments du mobilier de feu votre père. Cela devrait pouvoir aider certains à garder patience mais pas tous. Il vous faut des solution drastiques si vous voulez sauver quoi que ce soit de l'héritage de votre père.

Une nouvelle gorgée de thé. Le triste constat n'empêche pas Qaelinus de conserver son air le plus parfaitement hautain. Mais peut-être le fait qu'une jeune fille encore réputée peste et écervelée il y à quelques années, reprenne les affaires d'un marchand d'une qualité reconnue bien que modeste y soit pour quelque chose cette fois. Peut-être.

Aïe! Mélia s'attendait à de mauvaises nouvelles mais pas autant que ça. La manufacture pillé, elle ne s'en faisait pas d'illusion mais brulé, cela n'arrange pas les choses. L'héritière a de quoi revenir en force si jamais la Présidente tient parole mais reconstruire une manufacture peut prendre quelques mois et comme ses concurrents sont dans le même cas, elle perdrait l'avantage de les prendre de vitesse. Il va falloir se racheter des locaux, pas spécialement apte pour l'industrie du textile mais peu importe, les travaux peuvent attendre. C'est peu être une occasion de vendre ce terrain au dessus de sa valeur quand elle aura une discussion avec la présidente mais il y a bien des chances qu'elle se fasse envoyé promener sur ce point.

Les solutions drastiques, ce n'est pas cela qui manque. Vente du mobilier, vente de terrain sont de bonnes solutions rapides et souvent efficace. Maïa le sait mais elle est aussi bonne à marier, son père mort l'affaire est caduque. Mais ce point elle préfère éviter d'en parler. Se marier est solution parfaite mais ça lui supprimer toute option de liberté pour ses expériences les prochaines années à venir. En plus on ne sait jamais sur quoi on peut tomber. Peu être devrait-elle commencer à flâner auprès des Seigneurs Marchands? Ce point ne presse pas mais tout de même. Elle ne parlera pas de ce sujet, surement pas pour le moment.

Elle but une gorgée de thé avant de poser la tasse.

- Je vois, tout est à reconstruire... J'imagine que vous avez une idée de la valeur du terrain?

Ton purement narquois. Bien sûr qu'il l'a sinon il n'aurait pas proposé cette idée.

- Et combien reviendrait me rapporterait si j'hypothéquai le manoir? Pour ce dernier point, j'ai une personne avec qui je peux me mettre d'accord.

Elle soupira, la suite n'allait pas sembler très logique pour Qaelinus. Mélia ne peut et ne veut pas en parler tant qu'elle n'aura les droits et les garanties remis en main propre par la Présidente ou l'un de ses conseillers. Et pourtant, ce qu'elle s'apprête à dire est tout simplement de se montrer agressif sur le marché du textile au moment où personne ne s'est encore remis de la guerre civil, pas même elle. D'un côté, Mélia est une fille qui a toujours eu ce qu'elle désirait mais ici le caprice allait couté bien cher.

- Même si ça va vous ne paraitre pas logique, je préfère vous prévenir. Je compte refaire fonctionner la manufacture le plus vite possible. J'imagine que beaucoup avant moi ont eu la même idée: prendre la concurrence de vitesse. C'est imprévu mais j'imagine que certaines personnes pensent à revendre leur locaux, locaux qu'il faudra équiper convenablement j'imagine.

C'était fait, c'était clair. Maintenant elle allait avoir dans peu de temps les "oui mais non c'est impossible" du comptable et éventuellement certaines solutions. Il est payé pour ça après tout, payé pour supporté les caprices de cette gamine. Des caprices qui coutent les yeux de la tête. Si seulement il savait les arrangements, Maïa ne l'aurait pas fait monté sur ses grands chevaux comme ça promet d'être le cas.

Le comptable de la famille Valern croisa ses longues jambes, faisant légèrement tirer le tissus noir de son pantalon et laissant apercevoir d'un coup d'œil les belles chaussures de cuir flambant neuves à ses pieds. Un comptable n'avait pas à ce soucier des fluctuations de marchés ou de la guerre. On avait toujours besoin de quelqu'un pour compter pour soit. Il prend une nouvelle gorgée de thé tout en écoutant Mélia, né réagissant que par le haussement de sourcil droit au ton narquois employé par Mélia, ajoutant à son air hautain une légère surprise presque orgueilleuse en elle-même. Qaelinus repose la tasse de thé dans la coupelle de porcelaine laissée sur le bureau avant de se saisir d'un large livre faisant partie de l'importante pile de document qu'il avait sortit de sa mallette et tourna quelques pages. Posant son doigt sur une ligne, il descendit tout en déclarant :

- Il est effectivement imprévu et hautement improbable que vous preniez de vitesse une quelconque concurrence en terme de production. En supposant que vous disposiez des fonds suffisants pour le faire, il faudrait d'abords réinstaller la manufacture ce qui prendrait plusieurs mois ou au mieux un seul très long mois et avoir un personnel qualifié qui puisse au moins imiter la qualité des produits que l'on trouve sur le marché international. Quant aux ventes de locaux, elles sont possibles mais vous êtes difficilement en position d'acheter quoi que ce soit pour l'heure. D'ici là, les marchands n'ayant pas subit de pertes matérielles aussi importantes que vous aurons déjà prit une longueur d'avance sur la nouvelle conquête des marchés.

Son doigt cesse de descendre et il tapote trois fois avant de réajuster ses petites lunettes sur son nez de son index.

- Le terrain de votre père valait, à sa dernière estimation à nu, 430 pièces d'or. Son prix peut avoir changé en bien ou en mal puisque une manufacture entière à été bâtie puis détruite sur ce même terrain. Si je me permettais un calcul rapide, la reconstruction à l'identique de la fabrique de votre père vous coûterait environs 700 pièces d'or, qui s'ajouteraient donc à la valeur du terrain. Un personnel qualifié quant à lui, vous coûterait environs 30 nouvelles pièces d'or mais cette fois-ci, vous ne gagneriez rien sur le terrain.

Qaelinus referme son livre duquel s'échappe une fine bruine de poussière qui se révèle à la faveur d'un éclat de soleil qui filtre par la fenêtre sur la droite de la salle. Le comptable repose l'ouvrage et prends sa tasse qu'il termine d'une longue gorgée. Il observe ensuite un instant le fond de céramique, puis repose l'objet dans sa coupelle avant de tourner son regard vers la jeune Mélia.

- L'hypothèque de votre manoir peut-être une solution mais je vous la déconseille. Ce ne serait que vous faire un créancier de plus et probablement plus avare encore. Puis après un reniflement hautain, il ajoute : Il y à également votre mariage que vous devez prendre en compte. Vous êtes fiancée à ce coq de Anatolus Sorquellos. Ce dernier pourrait ne plus vouloir du mariage en voyant le coût que ce serait mais il pourrait également penser que les finances de votre père renflouerait les siennes.

Anatolus Sorquellos, à qui la jeune Mélia avait été promise dès ses 14 ans. Un homme d'environs une douzaine d'années l'aîné de Mélia et une bonne centaine d'années le puîné de Maya. C'était un marchand qui avait hérité de la grande influence de son père et d'un commerce important dans le domaine des fournitures pour les métiers de la forge et de la joailleries, dont les matières premières. Cependant le fils, qui se sentait également des inspirations guerrières, avait créé une petite armée de mercenaires qui le servait un peu partout dans le monde, remplissant des contrats en son nom. Un commerce lucratif, régulier mais il n'y avait aucun moyen de savoir si il était géré de manière efficiente, après tout Mélia ne se serait probablement pas préoccupée d'Anatolus ces dernières semaines ou même ces derniers mois.

Imprévu et hautement improbable... Sans rire? Maïa qui ne s'y connait pas trop en affaire est déjà au courant de ça! Le principal problème reste encore et toujours l'argent de départ. Sa famille est pour ainsi dire fauché maintenant, même si les économies de son père lui permettront de mener une petite vie tranquille et confortable pendant une quinzaine d'années mais surement pas un train de vie de petite princesse comme avant. Rajoutons à cela le coût de ses recherches, on peut diviser cela par trois si ce n'est plus. C'est que ça coute cher des recherches... Très cher même!

Qaelinus parle de gros sous, Mélia va donc arrondir de tête. Les économies représentaient 348 pièces d'or, une reconstruction vaudrait 700 pièces d'or, soit un manque de 342 pièces d'or. Encore une fois, elle ne se basera pas sur la vente des éventuelles parts et l'espoir de garantie. En hypothéquant le manoir, elle peut avoir sa somme mais le comptable ne se trompe pas, c'est avoir un créancier de plus sur le dos. Vendre le terrain de l'usine? Elle aurai 778 pièces d'or, une très belle somme pour repartir à zéro mais plus aucune rente possible dans les années à venir et si elle devait reconstruire, devra racheter un terrain.

Le problème, cette liquidité, Mélia devrait l'avoir mais encore une fois elle se base sur l'hypothèse que la Présidente Mayumi tienne parole. C'est bien là que réside tout le problème! Si elle n'a pas de fond pour refaire remarcher l'entreprise de son père, elle peut mettre d'hors et déjà la clef sous la porte. Non, plus vite elle aura son rendez-vous avec Mayumi, plus vite elle sera fixer, peu importe si c'est une bonne ou mauvaise nouvelle. Elle insistera quand même, étant assez têtue mais insistera bien sur le "si".

- Pour le premier point, je serais fixée dans les prochains jours. J'ai aussi mes petits arrangements de mon côté, il se trouve que la guerre civile m'en a permis d'en faire quelques uns. Il reste à savoir si la personne en question à la mémoire courte ou non. En attendant, je vous demanderais de quand même vous renseigner si certaines personnes ne sont pas aussi dans le même cas que moi, mais avec un entrepôt qui cette fois-ci, n'a pas pris le feu. De plus, j'aimerais connaitre l'évaluation du manoir même si je ne l'hypothèque pas.

Quitte à l'équiper, si elle a ses fonds ce ne sera pas vraiment un problème. Encore une fois, c'est une pure hypothèse sur laquelle l'Alchimiste n'aime pas se baser. C'est comme faire des expériences en se moquant complètement des dosages: c'est dangereux et ça fini toujours par lui exploser en plein visage. Là, c'est pareil!

C'est l'annonce de son mariage qui lui fera lever le visage de sa tasse de thé. Étonnant que ça soit lui qui en parle et à entendre sa voix, il n'a pas l'air de beaucoup aimé le fils Sorquellos, encore faut-il qu'un jour Qaelinus ait déjà apprécié quelqu'un. Avec la guerre, Mélia ne sait pas comment la maison Sorquellos a souffert mais il y a de fortes chance qu'Anatolus ne regarde que le bénéfice à court terme: les économies de Marcus. Les commerces d'Anatolus ont toujours fait lorgner Marcus malgré qu'il soit ultra protecteur envers sa fille. Mélia aussi, ne serait ce que pour la fortune et ses commerces se rapprochant assez de ses expériences. Rajoutons à cela qu'Anatolus n'est pas un mari gênant du moment qu'il joue au petit soldat même si Mélia se doute très bien qu'arriver à la trentaine, les hommes ont tendance à s'assagir et ne pensent plus qu'à leur descendance. C'est possible qu'il ne veuille plus des fiançailles, les relations entre lui et Mélia n'ont jamais été mauvaises mais pas cordial non plus, l'un ne s'intéressant pas plus à l'autre en temps normal. Même si la Présidente respecte ses accords, il est clair que Mélia aura besoin de ce mariage tôt ou tard si elle veut avoir influencé le Consil de Marchand à l'avenir pour ses propres projets.

- Ah oui, Anatolus... On ne sait pas trop comment son commerce a vécu la guerre civile et-

Elle s'interrompit quelques instants. Mélia est au courant des accords dont certains ne doivent pas trop s'ébruiter entre Mayumi et la piraterie. La forge et les fournitures, même si la maison Sorquellos a souffert de la guerre civile, ce n'est que temporaire. La forge et les fournitures sont des éléments clés pour un navire.

- Vous êtes en train de me faire comprendre qu'Anatolus va surtout se contenter de regarder les finances de mon père avant de regarder la situation de l'entreprise? Pour quelqu'un jouant au soldat à longueur de journée, ce n'est guère étonnant. Si c'est le cas, je crois que vendre du mobilier est une mauvaise idée si jamais je devais faire un diner romantique aux chandelles. Je vais y réfléchir sérieusement...

Et suivre les conseils de la Présidente qu'elle a donné il y a quelques jours. Il faut en aucun cas qu'Anatolus se renseigne sur les comptes de Marcus. Faire du charme? Même si Maïa sait que ce corps est parfaitement adapté pour cela, on ne peut pas dire que ça soit sa spécialité en temps normal vu qu'elle passe le plus clair de son temps au sous-sol. Il faudrait qu'elle rende une petite visite pour ne serait ce que trouver une occasion pour avoir un diner au chandelle et seulement là, elle improvisera.

- Si il n'y a plus rien d'autre à dire, on reportera le reste de la discussion dans les jours à venir. Je dois voir si de mon côté, l'accord que j'ai passé tient toujours mais aussi si un diner tête à tête avec mon fiancé est toujours d'actualité. Du votre, vous savez quoi faire. Vous renseignez sur un éventuel entrepôt libre et sur un éventuel acheteur du terrain de mon père... Et éventuellement de la santé du commerce de mon fiancé. Je ne tiens pas à passer pour une sotte, déjà que je le vois peu.

Le rendez-vous touchait manifestement à sa fin. Qaelinus termine sa tasse de thé d'une gorgée et commence à ranger les documents sortit de sa mallette avec avec la précision d'un chirurgien à l'égard de son patient. Il ne regarde même pas Mélia lorsque cette dernière parle de ces petits arrangements. Il n'avait pas l'intention de se mêler de l'illégal. Voilà bien qui prouvait que la jeune femme n'était même pas l'ombre de son père. Et elle envisageait bel et bien de s'accommoder de ce mariage avec Anatolus. Soit. Il n'était pas l'homme qui devait s'interposer, deux jeunes imbéciles devraient pouvoir s'entendre, non ? En tout cas ils s'entendraient tant qu'ils auraient de l'argent à dépenser. Enfin en tout les cas, une partie de cette argent, Qaelinus l'aurait alors rien d'alarmant. Il ferait son travail et recevrait salaire pour ça, peut importe comment le jeune couple vivrait l'après-guerre de la République. Une fois la totalité des documents rangée, le comptable tourne finalement son regard vers la jeune fille de marchand. Ou plutôt la jeune marchande.

- Faites comme vous l'entendez. Je m'en tiendrais à mon travail, je vous ferai pars de mes honoraires comprenant conseils et tâches demandées à notre prochain rendez-vous, considérez cette entre-vue gratuite comme l'expression de mes condoléances pour votre père et la sagesse financière qu'il incarnait.

La mallette de cuir rigide se ferma dans le cliquettement du loquets qui maintenait en sécurité les papiers confidentiels de la Maison Valern. Le grand Qaelinus se leva et tendit une main rigide vers Mélia tandis que l'on frappait à la porte du bureau. N'attendant pas que l'on en donne la permission, quelqu'un rentra. Ce n'était autre que le domestique envoyé prendre rendez-vous au Palais Présidentiel, rapidement suivit de Miranda qui tenait déjà le long et lourd manteau du comptable. Voyant que la dame de la maison n'en avait pas finit, il se plaça dans un coin de la pièce, presque comme si il avait été là tout du long. Après tout une main tendue ne l'invitait pas à sortir mais plutôt à attendre patiemment que Mélia daigne l'interroger. En tout les cas, Qaelinus savait effectivement quoi faire et cela serait fait. A un certains prix. Une fois la main serrée, il sortirait de la pièce en prenant le manteau que lui tendrait Miranda avant que cette dernière ne le raccompagne jusqu'à la porte. Le domestique s'approcha alors de l'alchimiste et déclara :

- Madame, madame La Présidente est prête à vous recevoir d'ici à deux heures si vous le souhaitez toujours.

Les quelques piques subtiles et discrètes, Maïa a passé l'âge de ne pas les reconnaitre. Les honoraires gratuites, c'est tout à son honneur mais parler de sagesse de Marcus a sa propre fille donne une petite idée du point de vue qu'il a de Mélia. Alors oui, Maïa est une buse en affaire
et elle saurait mieux reconnaitre la pureté d'un métal que la qualité d'une étoffe de soie! Quaelinus ne semblait pas motivé à partir, peu être s’attendait-il à recevoir une deuxième tasse de thé ne serait ce que pour la route mais il n’ira pas jusque là. Un péché mignon en quelques sortes, au moins la fille sera comment l’amadouer pour ne serait ce que recevoir un peu moins de sarcasme de sa part. Par contre une réduction des honoraires, ce n’est seulement qu’un phantasme !

Le domestique attendit que le comptable parte avant de lui annoncer la nouvelle. Bon réflexe de sa part, Mélia estime que ce point ne le regardait pas. Qu’il se contente de croire que c’est des mégouilles, ça fera l’affaire en attendant que Mélia n’ait pas fait main basse sur ne serait ce qu’une petite somme d’argent. La nouvelle soulagea tout de même Mélia, Mayumi n’a pas jouer les amnésiques, un bon point. Par contre il y avait de quoi être étonné d’un rendez-vous si spontané. Deux heures, en sachant que personne ne savait quand Mélia allait prendre son courage à deux mains et sortir du lit, soit la Présidente a un carnet de rendez-vous vierge, soit il y a anguille sous roche pour qu’elle prenne la peine d’annuler ce qu’elle avait prévu de faire cette après-midi. Même si le chaos s’est calmé, elle a encore de quoi faire.

-Deux heures ? J'imagine que plus tôt on se sera vu, mieux ça sera pour tout le monde.

Si lors de la discussion avec son comptable, Mélia s’était décidé d’aller voir son fiancé, cela sera reporté plus tard : elle ne l’a pas vu depuis longtemps et à un ou deux jours près, ça ne change pas grand-chose. Détails important, c’était Anatolus de prendre des nouvelles de sa future femme, visiblement il n’en a pas pris. Comme quoi ils sont très proches…

La première demi heure, elle la passera à fouiller le bureau de son père. Les papiers, ce n’est pas son « truc » mais au moins ça lui permettra de vérifier que rien n’a été voler. La seconde demi-heure, c’est de voir l’état de son laboratoire et accessoirement de la cave (obligé, elle passe devant…). La porte de son laboratoire a beau être solide mais c’est connu que plus solide, plus les chances d’être défoncé lors d’un pillage sont élevé. C’est ainsi, à croire que cette loi est universelle ! Et comme il n’y a rien à voler, tout à dû à se retrouver par terre. Bref, de quoi fendre le cœur à Mélia vu qu’elle risque de bien voir ce qui est l’équivalent d’un film d’horreur : tous ses jouets de cassés. Foutu religion va !

L’heure restante, c’est préparation puis rendez-vous de la Présidente, c’est qu’elle ne tient pas arriver en retard. Comme les rues ne sont toujours pas sûr, l’un des gardes l’accompagnera. Les rues ont beau être fréquentés à cette heure-ci, il y a encore les cicatrices de cette guerre de présentes à Athéïle.

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