Une Ombre plane sur la cité des Kamis

Une ombre. Rien de plus, rien de moins. Telle avait toujours était la vie de l’invocation avant de devenir un être de magie pure… Une ombre suivant son propriétaire, ne pouvant jamais bouger de sa propre volonté. Une créature sans réelle pensée et sans liberté mais qu’importe car à cette époque, Ombre n’était qu’une ombre. Ce fut cette petite fille brune qui lui donna sa première vie, celle de compagnon invisible aux autres. Un compagnon sans colère, sans amertume, sans vice… Un compagnon aimant jusqu’à ce qu’il soit nourri et dès lors, une ombre est devenue Ombre…

Les ténèbres infinies avaient rappelé leur serviteur. Au moment du combat de Fentaeris, un homme s’était dressé au-dessus de tous et avait renvoyé l’invocation. Cet Alkor de Zirejar avait été une vraie plaie, même si Ombre ne l’avait jamais réellement affronté. Une seule chose satisfaisait la créature sombre, le visage de souffrance de ce chef de la Résistance à la vue du corps sans vie de sa femme. Une douce sensation de plaisir sadique se propagea dans l’ensemble de la conscience des ténèbres infinies. Douleur, colère, haine et puissance. Tout cela était partagé dans les ténèbres et chacune des créatures s’en nourrissait afin de se rendre plus fort. Seulement voilà, le repas ne dura pas très longtemps, pour la deuxième fois en peu de temps, Ombre fut invoqué dans le monde des humains.

Comme précédemment, la pièce dans laquelle il avait atterri était sombre et caverneuse. Une seule vie « brillait » dans les ténèbres, celle de son invocatrice. Une voix retentie dans la pièce, une voix où l’âge transparaissait.

- Es-tu là gardien ? J’ai suivi le rituel d’invocation et je suis sûr que tu m’entends… Réponds-moi gardien !

Un accent ! Tu es une vieille femme d’une région éloigné dont je n’ai pas entendu l’accent depuis bien longtemps.. Femme de l’empire de Hù-Bei ! Que veux-tu en m’invoquant ?

La vieille femme et Ombre partageait le lien mental si particulier qui permettait à l’invocation d’entrer en contact avec son invocatrice par télépathie. Ce contact si important permettant à Ombre de fouiller la mémoire de l’invocatrice et de déceler son caractère. Cette nouvelle invocatrice n’était ni plus ni moins qu’une croyante originelle qui avait trouvé un vieux texte et l’avait traduit. Ce texte faisait référence à un esprit de la nuit qui serait capable d’exaucer tous les vœux de l’invocateur… Une erreur claire dans la traduction mais Ombre se garderait bien de faire la moindre remarque à ce sujet, trop envieux de recommencer à massacrer sans impunité.

- J’aimerais, ô grand gardien, que tu sauves ma petite fille qui est très malade. Cette enfant est tout ce qui me reste depuis que ces parents sont morts tué par des ronins !

Le dernier mot était plein de haine et cela ravi Ombre. La vieille femme était clairement bonne, pacifique même et si ce n’est cette erreur de traduction, jamais elle n’aurait fait appel à un être tel que Ombre.

- J’ai besoin de toi, grand Kami de la nuit. Les médecins disent que ma petite-fille ne survivra pas à l’hiver approchant. Cette enfant est belle et gentille. Elle n’a jamais eu de chance alors s’il vous plait Kami, sauvez-là !

Les paroles de la vieille femme était hilarante pour la créature des ténèbres. La grand-mère prenait un être qui détestait l’Origine pour une de ses créatures. Elle lui offrait un titre qui n’était clairement pas le sien et en plus, elle lui offrait un réceptacle sans s’en rendre compte. D’une pensée qu’il ne voulait pas trop moqueuse ou agressive, Ombre entama son plan.

Vieille femme, tu te rends compte que tu me demandes de défier l’ordre naturel des choses en sauvant une enfant sans rien en échange… Une vie ne peut être sauvé sans tribut… Je me dois de ref…

- Prends ma vie à la place de la sienne ! Elle est tout ce qui me reste alors je t‘en pris… Ne me la prends pas… Laisse-la vivre…

Ces paroles avaient quelque chose de douloureux pour Ombre, sans doute l’écho d’un lointain souvenir qu’il valait mieux oublier… Laissant quelques instants planer le doute sur sa réponse, Ombre en profita pour se rapprocher de la vieille « vie ».

Très bien, j’accepte. Mais pour que cela se fasse dans les règles, tu dois être prête. Mourir de ton plein gré, sans aucun regret… Tu dois te laisser aller à la mort… Afin que celle-ci se désintéresse de ta petite fille et vienne te chercher toi plutôt qu’elle…

Quelques instants le silence se prolonge et la voix de la vieille dame éclaire la pièce une dernière fois en disant qu’elle était prête. Ombre s’élance et pénètre le corps et l’âme de la vieille femme. Une âme combative est difficile à vaincre mais une âme résignée comme celle de la grand-mère fut rapidement broyée et dévorée par Ombre. Un nouveau corps à disposition, de nouveaux souvenirs, une nouvelle vie à portée de bras… Mais avant tout, il fallait tout préparer. Ombre découvrit la pièce dans laquelle il se trouvait, un vieux cabinet de travail… Très vieux d’après ce qui pouvait être vu… Un bureau abîmé trônait dans un coin. En fouillant un peu, l’invocation trouva un papier et un crayon et griffonna quelques mots sur un morceau de papier qui traînait.

Puis, se fiant aux souvenirs de la vieille femme, Ombre se dirigea vers la chambre dans laquelle se trouvait la petite fille de l’invocatrice. Une chance que cette dernière ait procédé au rituel en pleine nuit, loin des rayons mortels du Soleil, car sinon Ombre aurait été obligé d’obéir de remettre son plan à plus tard. En arrivant dans la chambre, la créature des ténèbres découvrit une fillette âgée d’une douzaine d’années, aux cheveux sombres et surtout au teint très pâle… Une vision revint du passé avant d’être balayé par une claque mentale. S’approchant doucement du lit, Ombre se saisit d’un coussin et commença à priver d’oxygène la fillette. La petite se débattit pendant quelques instants avant de sombrer dans les bras de la mort. La main tremblante de la vieille femme plaça alors le morceau de papier sur le bord du lit et Ombre changea de corps.

Le petit corps de la jeune fille se redressa et plusieurs mèches de cheveux s’allongèrent afin de transpercer le corps sans vie de la grand-mère. Le lendemain, lorsque le vieux et unique domestique de la grand -mère viendrait dans la chambre de la jeune fille, il découvrirait le lit vide et le corps de la maîtresse de maison poignardé avec une lettre réclamant une rançon à ses côtés. Ume Tatsuki n’étant pas vraiment apprécié par les autres membres du clan du Corbeau, personne ne devrait se précipiter pour payer la soi-disant rançon.

Ombre se leva, se dirigea vers l’armoire à vêtements de la fillette et se changea. Il enfila une tenue bleu nuit de lin et ajouta un long manteau rouge de coton par-dessus. Puis, passant par la fenêtre, la fillette déploya des ailes sombres et se dirigea vers le quartier des Ruelles. Là se trouvait les personnes les moins désirées de la cité. Là se trouvait un grand garde-manger afin qu’Ombre puisse se nourrir. Là, l’invocation choisirait la suite de sa démarche.

La créature des ténèbres au corps de fillette choisit une ruelle très étroite pour atterrir après avoir vérifier que cette dernière était bien déserte. Après avoir rabattu le capuchon de son manteau afin de masquer ses yeux goudrons, la fillette sortit de la ruelle et commença à déambuler en attente d’une rencontre intéressante… Que ce soit une proie ou bien autre chose…

Un appétit farouche tiraillait Ombre mais les ruelles de la cité des Kamis n’avait pas grand-chose d’appétissant à fournir… Que des mendiants malades et rachitiques. Rien de convenable pour exciter l’instinct de Traqueur de la créature. Et lorsqu’il arrivait dans des rues plus fréquentées, la garde et les samouraïs étaient toujours présent… Pas de gros dangers mais hors de question de se faire repérer si tôt. Cette situation avait de quoi énerver plus d’une créature des ténèbres vorace. Et rien ne s’arrangeait puisque les heures passaient et le Soleil approchait. Et alors que Ombre choisit de changer d’objectif et de trouver un endroit où se terrer pendant la journée, un petit homme apparaît en travers de son chemin.

L’homme semble attendre quelqu’un et la coïncidence est trop belle pour être réelle. Un froissement dans le manteau de l’apparente jeune fille se fait lorsque l’homme s’incline poliment. Ombre craignant une attaque par derrière, la vision de Traqueur supplante celle d’humain. Mais aucun signe de mouvement hostile en provenance des vies environnantes. Aussi, la fillette s’avance vers l’homme et le dévisage de ses yeux noirs avant de s’adresser à se dernier d’une petite voix mélodieuse et faible afin de n’être entendu que par ce dernier.

- Que sais-tu sur le Traqueur, humain ? Et comment as-tu appris qui j’étais ? Et surtout, qui es-tu toi ?

Ombre regarda le ciel qui commençait à s’éclaircir, signe que l’aurore était proche. Il écoutera la réponse de l’homme en toge avant de reposer de nouvelles questions, toujours avec la petite voix de fillette.

-Maintenant, dis moi humain, connais-tu un endroit à l’abri des regards et où une nourriture décente pourrait être fournie ?

Au ton de la voix, il était clair de quel genre de nourriture Ombre parlait. Mais qu’allait-il apprendre d’intéressant à l’invocation dont les desseins n’étaient pas encore fixés ?

L’homme ricana brièvement lorsqu’Ombre admit, de manière quelque peu indirecte certes, qu’il était bien Ombre le Traqueur. Puis il s’inclina une nouvelle fois bien bas, puis plongeant ses mains dans chacune de ses manches il déclara :

- Le Traqueur est une puissance noire et terrible qu’il convient de n’invoquer que si vous êtes prêt à en payer le prix, ça oui.

Sa voix avait quelque chose de mielleux mais ses phrases se terminaient par des petits ricanements désagréables à l’oreille. Comme si les pensées qui se bousculaient dans son crâne à demi-chauve avaient toutes des raisons de le faire rire mais pas forcément par hilarité pure simple mais plutôt par nervosité ou un peu par folie. D’ailleurs son regard était rendu brillant et ce n’était pas par la fièvre alors soit un grand esprit soit la folie. Peut-être les deux.

- Je suis Izawa Nakitoro, je fus serviteur du corbeau mais ce dernier n’a pas sût reconnaître mon génie ! Ton arrivée à été aisée à remarquer Traqueur, le sillage des magies nécromantiques démériennes ayant bien plus perturbé l’éther magique que ton invocation ne l’aurait fait en temps normal, ohoh oui. Et que devrais-je dire du fait que c’est une femme du corbeau qui t’a invoquée et l’une de ses enfants que tu possèdes. Ta présence est déjà signalée en de haut lieux mais par chance pour toi, la méfiance que suscites mon ancien clan auprès des autres t’évites d’avoir d’ors et déjà les érudits du Corbeau et leurs serviteurs à tes trousses.

Izawa ricana une nouvelle fois, semblant se murmurer quelque chose à lui-même avant de regarder Ombre dans les yeux, ne semblant pas effrayer par ses globes semblant fait d’huile plus que d’une réelle matière organique.

- Nous pourrons discuter plus sereinement dans mon palace, haha, suit moi Traqueur, mes sujets d’expérience feront d’excellent encas en attendant mieux, héhéhé.

S’éloignant d’une démarche traînante tout en se frottant les mains dans sa toge, peut-être pour se protéger un peu du froid de cet automne, Izawa s’éloignant en continuant de se murmurer des paroles incompréhensibles, quand bien même Ombre en percevrait-il quelques bribes. Mais toujours est-il que cet homme probablement fou le mena jusqu’à un monceau de détritus dans une ruelle encore plus sales et perdues que les autres. Il écarta hâtivement un certains nombre de détritus puant, révélant une petite porte qu’il ouvrit, se pliant en deux pour pouvoir rentrer. Là, Ombre et l’homme déboucheraient sur une salle d’une taille équivalente à un petit salon, une palliasse crasseuse installées dans un coin, une petite table au milieu et trois cages contre un mur dans laquelle trois enfants de plutôt bonne constitution se tenait là. Ils semblaient comme assommés et à en juger par les mixtures présentes sur la table d’Izawa, ils avaient dû êtres drogués et bien que conscients, ils ne se débattraient probablement pas beaucoup au moment d’êtres dévorés, mais Ombre pouvait-il faire le difficile ?

- Prends en un, Traqueur, j’aurais encore besoin des deux autres quelques temps mais ils ne tarderont pas à t’êtres céder n’est crainte, haha, oui.

Les réponses de l’homme étaient claires mais le rire de ce dernier, ou plutôt ses ricanements, avaient quelque chose de vraiment irritant. Par le passé, Ombre avait eu un maître fou... Une histoire sombre à souhait avec trahisons et complots. Abandonnant sa petite rêverie, le Traqueur écouta l’homme en toge se présenter et expliquer comment la créature ténébreuse avait été repéré et à son tour traquée…

- Quelle ironie que le Traqueur soit devenu le Traqué ! Il est vrai que la magie nécromante n’est pas des plus discrète mais ce court séjour en Déméria aura eu le mérite de m’apprendre un ou deux nouveaux tour…

Lorsque l’homme signala que la présence d’Ombre était déjà connue des grandes pontes de Hù-Beï mais qu’il devait sa tranquilité uniquement à la méfiance éprouvée à l’encontre du clan du Corbeau, l’invocation se tut et commença à se maudire intérieurement. Être en dette envers son maître était une chose, être en dette envers une famille de l’Empire des Kamis en était une autre… Même si la dette était indirecte, même si à la première occasion le clan tuerait Ombre, la dette était là et ce n’était pas quelque chose d’agréable.

L’homme s’éloigna en ricanant une nouvelle fois après avoir parlé d’un possible repas. L’invocation suivit, quelques pas en retrait, ne faisant pas attention à ce que l’homme pouvait dire. Les pensées du Traqueur étaient ailleurs. Une dette envers au moins un membre d’un peuple haï, c’était une de trop. Le fou conduisit Ombre dans un petit réduit disposant d’une paillasse, d’une table et surtout de 3 enfants. Les cobayes du « fou » étaient clairement drogués, chose un peu décevante pour une créature avide de hurlements.

- C’est la seconde fois que l’on m’offre de la nourriture droguée ! Où est passé le temps où les chaînes suffisaient pour entraver quelque un ? Enfin, itadakimasu…

Suite à ces paroles, Ombre tendit une de ses petites mains de fillette et les ongles se lancèrent à l’assaut d’un des encas. Il ne faudrait que quelques instants pour que la mort ne prenne le pas sur la vie et plusieurs minutes pour que la chair et le sang ne laissent place à des os parfaitement nettoyés.

L’invocation savourait encore son repas de fortune lorsqu’elle s’adressa à nouveau à l’homme en toge.

- Tu m’intrigues Izawa Nakitoro. Tu connais l’existence du Traqueur mais en plus tu sais le repérer… Et non content de cela, tu l’aides en plus… Je me pose donc une question : Que souhaites-tu de moi ? Une alliance ? Mais dans quel but dans ce cas ?

Les ongles se rétractent à cet instant et finissent par revenir dans les doigts de leur petite propriétaire. Un petit sourire innocent apparaît mais les yeux de goudrons le transforme aussitôt en une expression d’une indicible cruauté.

- Gochousama deshita… Ton génie, de quoi est-il capable exactement ?

Si l’invocation et cet homme pouvaient et voulaient travailler ensemble sur un objectif commun, ils avaient tout intérêt à connaître l’étendue de leurs capacités respectives. Et avec un peu de travail, le Chaos pourrait s’installer en Hù-Beï.

Alors qu’Ombre dévore sa nourriture droguée, disant que c’était mieux avant, Izawa ricanait en murmurant quelques mots et en fouillant sur la table, encombrée de divers outils de chirurgie pour la plupart partiellement rouillés et de parchemins de schémas sur le corps humain ou recouverts de symboles étranges dont certains ressemblaient à ceux aperçu à Fentaeris par Ombre. Le hùbéï dérangé est toujours entrain de fouiller dans ses affaires lorsqu’Ombre lui pose ses premières questions. Mais dans tout le fouillis c’est un peu éclairci. D’un côté il à replié ses parchemins et en à refermé certains grâce à des cordelettes et de l’autre côté il à placé ses outils ainsi qu’un certains nombre d’objets aux fonctions et aux formes pour le moins intrigantes.

S’interrompant dans sa réorganisation de son poste de travail, Izawa regarda droit devant lui, l’air un peu pensif puis ricana avant de se tourner vers Ombre et de déclarer : .

- Des chaînes ? Puis il fit prit d’un rire qui se stoppa aussi rapidement qu’il était venu.

L’ancien serviteur du corbeau s’éloigna alors de la table tout en saisissant un bol remplit d’un liquide verdâtre et se dirigea vers la cage du centre, celle de gauche ayant été « vidée » par Ombre. Saisissant la tête de l’occupant de la cage, il l’a rapprocha des barreaux avant de se tourner vers le traqueur en ricanant.

- Je vais te montrer pourquoi des chaînes ne suffiraient pas, hahaha oui, oui.

De sa main droite, il ouvrit l’œil gauche de l’enfant, révélant un regard inconscient mais quel regard ! L’iris de cet œil était orange, parcourût par des sortes d’hélices noires en mouvement qui tournait autour de son centre, tel un tourbillon de ténèbres. Continuant de ricaner, Izawa laissa l’œil se refermer et dirigea sa main vers la bouche qu’il ouvrit en grand d’une seule main, révélant des dizaines de crocs acérés et une langue violacé parcourue d’excroissance de chair noirâtre. Profitant de l’occasion, il déversa une partie du liquide contenu dans le bol dans la bouche de son monstrueux prisonnier, imprimant un mouvement de déglutissement en appliquant deux doigts contre sa gorge et en frottant un peu de haut en bas. La créature qui n’était clairement pas ou plus tout à fait humaine, avala avec un grognement de douleur plus proche de celui d’un chien de chasse que du gémissement de douleur d’un enfant dont il devait avoir l’âge soit 10 ou 12 ans.

- Mes sujets d’expériences briseraient leurs chaîne si facilement si je tardais à leurs donner leur traitement, haha. Les cages ne tiendraient que quelques seconde de plus mais c’est suffisant pour leurs administrer leurs dose avant que toutes leurs puissance ne s’éveille complètement, héhéha, oui.

Izawa alla faire avaler une autre mesure de sa décoction à la fille dans la cage la plus à droite, cette dernière devait être à peine plus âgée que le garçon et sa bouche présentait moins de mutations que ce dernier. Il n’y avait pas de langue étrange ou de dent supplémentaire mais celles déjà présentes semblaient capable de déchirer chair et os aussi facilement que celles d’un loup. Puis, le hùbéï revînt vers sa table pour y déposer le bol et se tourna vers Ombre.

- Une alliance serait la bienvenue certes, hahahé. Dans mon immense génie, j’ai pensé à créer des soldats pour l’Empereur. Des soldats plus puissants que les Guerriers de Zolts, les Sages Buggïns, les Samouraïs ou même les Chevaliers du Stolenmark, oui, oui ! Hahaha. J’ai utilisé des objets laissés par les Enfants de Malgazann après leurs défaite et appliqués les énergies dont ils étaient imprégnées sur diffèrent sujets d’étude, gnahaha. Mais ils n’ont pas bien résisté à ces expériences et même si des mutations intéressantes sont survenues, aucun n’a survécu, héhéhé. Ceux-là sont les numéros 24 et 25. Tu viens de dévorer 23 sur lequel je n’avais pas encore pût faire de test, même si la proximité de ses deux compagnons avait commencé à faire changer ses yeux, mais ce n’est pas grave mmhaha.

Puis, il retourna à sa table et y prit une pince avec laquelle il se saisit d’un morceau de métal doré. Ombre pouvait remarquer quelque chose au sujet de ce morceau de métal. C’était à la limite entre sa vision de Traqueur et d’humain, quelque chose qui était là mais à peine visible et le devenait lorsqu’il échangeait les deux visions. Une énergie pulsait de ce morceau de métal. Une énergie noire qui imprimait le même mouvement que celui d’un cœur affaiblit. Izawa tendit le morceau de métal vers le plafond et se tourna vers Ombre.

- Les artefacts des damnés tel que celui-ci sont devenus très rare et pour poursuivre mes expériences, j’ai besoin de d’avantage de ses objets mais aussi de sujets d’expérience plus robuste et je ne connais qu’un peuple qui le soit assez.

Un rire sournois s’échappa dès lèvres de Izawa tandis que l’objet continuait de pulser, sans que le hùbéï ne semble s’en rendre compte.

- Avec un allié tel que toi pour me protéger dans les Terres du Corbeau et à Oridia, je serais en mesure d’étudier la magie des damnés et très probablement de reproduire de nombreux effets qui sont les siens. Elle pourrait me rendre puissant mais je n’ose m’imaginer quels bénéfices elle pourrait apporter à un être de ténèbres tel que toi.

Le fou est prit d’une soudaine envi de rangement qui dure jusqu’à ce que Ombre pose ses questions… Toujours suivi de son petit rire irritant, Izawa explique les capacités monstrueuses de ses sujets d’expérience. En plus de cela, il montre à Ombre un spectacle ô combien intéressant. Des super soldats dans le corps d’enfant d’une douzaine d’années. Et si Izawa disait vrai, ses créations étaient vraiment quelque chose d’extraordinaire.

- J’ai rencontré bien des gens au cours de mon existence… Mais bien peut était capable de me surprendre…

Puis vint l’annonce la plus incroyable pour Ombre. Les recherches de Izawa Nakitoro étaient basées sur les artefacts laissés par les enfants de Malgazann… En plus, il souhaitait bel et bien une alliance… Protection et aide contre possible gain de puissance. Et même si ce n’était pas le cas, il pourrait aider quelqu’un à attaquer les Originels sur leur territoire millénaire… Rien que pour ce dernier point, l’alliance valait le coup.

Alors que Ombre commençait à être sérieusement impressionné par ce que cet homme était capable de faire, ce dernier montra un morceau de métal doré… Un métal qu’Ombre pourrait qualifié de vivant. Lorsqu’il changeait de vision mais que cette dernière n’était pas stabilisé, le métal avait le même type de présence que n’importe quelle « Vie »… Une chose bien déconcertante pour un être comme Ombre mais très attirante à la fois. Toujours les yeux fixé sur la pierre doré, Ombre écouta Izawa expliquer de quoi il avait besoin pour continuer ses recherches et aboutirent à un gain de puissance folle.

Un rire léger, issu de la gorge d’une fillette de douze ans, accompagna le rire du hù-beï. Puis vint la réponse de l’invocation à la proposition alléchante du fou.

- Comment dire non à cela ? J’accepte avec joie de m’allier à quelqu’un de ton talent Izawa ! Et je peux même t’aider un peu plus. Si tu as de quoi stabiliser les essences d’invocation qui ont tendance à retourner à leur plan d‘origine, je peux te fournir de mon pouvoir pour tes recherches… Ensuite, dis-moi, où sont cachés ses artefacts des enfants de Malgazann ? Et si tu n’as pas le vertige, je pourrai t’y emmener par le chemin des airs dès la tombée de la nuit donc prépare tes bagages.

Izawa reposa le morceau de métal sur la table, prenant toujours bien garde de ne pas le toucher, tandis que Ombre lui parlait du sujet d’expérience que son essence pouvait devenir et de l’accès aux artefacts. Alors que l’invocation avait finit depuis un moment et que Izawa c’était contenté de fixer avec de grands yeux vides de toutes pensée ou émotion l’objet damné, la lumière de folie dans son regard revînt en même temps que son rire.

- Tu prends une sage décision Traqueur. Notre coopération sera extrêmement fructueuse, j’en suis persuadé, hinhinhin. Déclara-t-il tout en se frottant les mains. Puis il arrêta brusquement de ricaner en écarquillant les yeux avant de se prendre la tête entre les mains en hochant négativement du chef. En volant ? Non, non, non, non, non, non, non ! Nous devons marcher, marcher, marCHER ! hahaha, oui, marcher.

Le scientifique fou était clairement très atteint mais avait ses périodes, jusqu’à présent il avait tenu des raisonnements plutôt cohérent et logiques mais l’idée de voler semblait avoir déclenché quelque chose dans son esprit brisé, qui pouvait savoir quels autres concepts, pourraient déclencher des élans de folies de ce type ? Mais il fallait avouer que l’idée de voler n’était pas forcément commune pour les humains. Peut-être était-ce seulement ce genre de choses qui faisait réagir Izawa, peut-être pas. Pendant tout son éclair de folie sur le fait de voler, l’intensité de son regard s’était réduite comme si il perdait la vue ou qu’il ne voyait pas tout à fait ce qu’il regardait, que tout devenait flou. Soudain, son regard retrouva sa « lucidité » et il se retourna vers Ombre.

- Les artefacts sont biens gardés. Le Corbeau le garde entre ses plumes les plus noires, oui, oui, hahaha. Surtout depuis ces dernières années. Des objets avaient été disséminés dans la nature, donnant naissance à des aberrations sans nom hahaha, oui ! Parmi elle, une créature faites de ténèbres également hahaha oui. Des évènements terribles et depuis le Corbeau garde encore plus solidement ses précieux artefacts.

Puis écarquillant les yeux, Izawa s’écria :

- Nous partirons à la nuit tombée ! A pied ! En direction de la cité des corbeaux ! Le chemin sera dangereux mais je compte sur toi et qui sait si nous ne pourrions pas retrouver certains de ces objets sur la côte, haha oui, oui. Pour ce qui est de l’expérience sur toi mon cher traqueur, ne nous hâtons pas. J’ignore encore comment garder des échantillons de toi intact et qui sait si cela ne t’affecterais pas directement. Il me faut d’abords mieux comprendre ces mutations, hinhinhin, alors nous pourrons étudier les conséquences de la magie damnée sur ton être, hahaha.

Ombre écoute l’humain lui répondre avec l’enthousiasme propre aux fous lorsque la créature lui confia son sentiment sur leur nouvelle alliance. Puis, comme si l’information avait mis du temps à parvenir au cerveau de Izawa, la crise de folie commença. La peur de voler semblait être un déclencheur de crise pour l’humain. Chose bonne à savoir pour le Traqueur qui pourtant ne comprenait pas cette peur. Voler permettait de se libérer des contraintes terrestres et de chasser sur un plus grand territoire en prenant les proies au dépourvu. Enfin… La traque serait assez riche à terre pour ne pas avoir à grimper dans les cieux.

- Très bien, nous irons en marchant mais j’ai encore une proposition comme myen de déplacement. As-tu quelque chose contre le fait que je te porte, toi, tes affaires et mon corps humain pour aller plus vite ? Je peux adopter la forme que tu préfères : cheval ; tigre ; gorille géant ou autre.

Après avoir fait sa proposition, Ombre tourne sa tête dans toutes les directions afin de voir que pourrait bien être les bagages hypothétiques du fou. Son regard se posa alors sur les sujets d’expérimentation de Izawa Nakitoro. Les emmener était possible mais il serait difficile d’expliquer leur état si jamais les deux associés croisaient des patrouilles impériales. Les brigands ne seront pas un problème mais si l’alerte était donnée, leurs mouvements, déjà réduits à la nuit, seraient encore plus entravés.

- Et eux, qu’en faisons-nous ? On s’en débarrasse ? On les libère dans la cité comme diversion ? On les emmène pour que tu termines tes expériences ?

Puis Ombre recommence à parler de leur futur départ de la cité des Kamis.

- Tu as sans doute déjà réfléchi à un moyen de quitter la cité de discrète, aussi je me contenterai de te suivre. De plus, n’oublie pas que lorsque le Soleil se lèvera je serai inutile et il nous faudra trouver un abri si tu ne veux pas te déplacer sans protection… Bon, prépares tes affaires Izawa, nous partirons pour la cité des corbeaux dès que le Soleil se sera couché.

Le fou était quelque un d’assez sympathique aux « yeux » de la créature des ténèbres. Sa folie le rendait encore plus attrayant et attachant. De plus, elle permettait d’avoir une assez bonne idée des dangers qui attendaient les deux futurs voyageurs. Le Corbeau semblait être le clan le plus à craindre dans cette affaire, ce dernier étant le plus au fait des expériences de l’humain… Mais les autres clans étaient tout aussi dangereux et il valait mieux ne pas avoir à tous les affronter en même temps… Sauf si les rivalités pouvaient être utilisées contre les hù-beï…

Les pensées d’Ombre le faisaient déambuler dans le petit réduit qui servait de maison et de laboratoire à Izawa. Passant à côté des « enfants de Malgazann », la créature vivant dans les ténèbres infinies ne put qu’admirer le travail du chercheur. Les enfants rassemblaient à de vraies machines de guerre… Une moue appréciatrice se peignit sur le visage de fillette d’Ombre. L’invocation délaissa les créatures de Malgazann pour aller s’asseoir dans un coin, les jambes serrées contre le corps comme si il souhaitait ranger le corps de la petite Shiina Tatsuki.

Ceux qui pouvaient voir dans le noir observaient que les ténèbres se déplaçaient… Enfin, il s’agissait plutôt d’Ombre qui sortait du corps de Shiina et s’accrochait au mur pour grimper au plafond. Ce dernier s’étendit jusqu’à le recouvrir complètement d’une fine pellicule de son corps goudronneux.

La journée commençait et continuerait alors qu’une Ombre serait au plafond du laboratoire. La créature des ténèbres veillerait à ce que rien ne perturbe le sommeil de son partenaire. Elle-même se mettrait en veille, l’état le plus proche de ce que les hommes pouvaient appeler le sommeil… Et, sans doute à cause du retour inattendu en Hù-Beï, les somnolences d’Ombre le mèneraient à un souvenir particulier… Un rare souvenir agréable.

Maki…